En cette semaine si particulière, le moment semble opportun de complètement stopper ce temps qui s’écoule pourtant déjà si lentement vers samedi. Parce que oui, ce derby obstrue nos pensées, les accapare et prendre du recul sur ce que notre club est en train de vivre dans ces conditions n’est pas chose aisée, portés que nous sommes par l’adrénaline qui est déjà là… en attendant l’électricité qui parcourra immanquablement nos échines lorsque Seko Fofana jaillira en premier du tunnel de la Lepagnot, vers 16h58, sous les « le jour de gloire est arrivé.» Mais c’est aussi pour ça qu’il n’y a finalement pas de meilleur moment pour nous retourner. Parce que notre Racing revient peu à peu à la lumière, parce qu’il parait redevenir compétitif, parce qu’il incarne à nouveau ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : un club historiquement imparfait, au palmarès pas tout à fait en adéquation avec l’immense passion qui l’entoure depuis 1906, mais dont l’espoir de jours meilleurs guidaient inlassablement son peuple. Oui, depuis 2008, il est certainement arrivé à certains d’entre nous d’être touchés par le dépit, le découragement ou la colère. Oui, il nous est peut-être parfois arrivé de nous demander si la pente vers les sommets n’était finalement pas devenue bien trop forte pour le RCL. Mais jamais, ô grand jamais, il ne nous est arrivé de ne plus être fier d’être Lensois. « Si nous avons la foi, le Racing Club de Lens gagnera. » Elle ne nous a jamais quittés, même les soirs de matchs nuls arrachés à Arles-Avignon comme de piètres miettes de bonheur, même les soirs de défaites à Bollaert face à Bourg-en-Bresse, comme un gros festin de malheur. Aujourd’hui, et même s’il nous faut évidemment remercier les dirigeants, membres du staff, et joueurs de nous avoir remis dans le droit chemin, permettez-nous de simplement et égoïstement penser à nous tous. Loin de nous l’idée de ressasser cette vieille rengaine du « meilleur public de France », sortie comme un élément marketing depuis bien trop d’années sur fond d’autosatisfaction et sous forme d’autoproclamation. Les meilleurs supporters n’existent pas. Les vrais, en revanche, Bollaert peut en témoigner : il en porte beaucoup dans ses travées. Samedi, on se regardera tous droit dans les yeux. De l’abonné de la Xerces qui scrutera son vis-à-vis en Lepagnot, de la mamie en Delacourt 2 qui lorgnera de loin ceux qui étoufferont, c’est sûr, les chants adverses en Trannin. Parce qu’on sait tous ce qu’on a vécu et que ces moments de véritables galères nous lient tous à jamais. Peu importe que notre club n’ait que peu gagné en 115 ans, on sait tous qu’on ne l’a jamais perdu, notre Racing. S’il s’est égaré, on l’a accompagné dans chacune de ses péripéties, d’Orléans à Béziers, du Gazelec à Vannes. On a redécouvert la France des routes nationales, loin, très loin même, du périphérique parisien ou de la Cannebière. Mais s’il y a bien un enseignement à conserver comme un trésor, puisque d’aucun aiment à nous rappeler notre armoire à trophées poussiéreuse et famélique, c’est celui-ci : jamais nous n’avons été abandonnés dans la tempête. Jamais il ne nous est arrivé, même en plein hiver alors que notre club végétait dans le ventre mou de L2, de se sentir isolés dans notre peine. Mieux : en grimpant dans un J9 pour Istres ou en tentant de trouver une position pour dormir dans un bus en partance pour Châteauroux, on a toujours su qu’il y aurait plein de copine set de copains à l’arrivée pour continuer à y croire, que nos parcages seraient toujours copieusement garnis, que ces couleurs sang et or, si importantes à nos yeux, on ne serait jamais les seuls à les porter. Là où les autres clubs populaires français (Marseille, Paris, Nantes, Saint-Etienne,…) ont bâti leurs gloires sur des titres, des périodes glorieuses, des Unes des journaux, la nôtre s’est toujours écrite dans la douleur, à l’encre de parcours accidentés et surtout pas linéaires. C’est parce que nous avons souffert (oui, oui, c’est arrivé), qu’il nous faut profiter de ces moments si fragiles que nous embrassons actuellement. C’est parce que ce ne sont pas seulement onze joueurs qui pénètreront sur la pelouse samedi, ni même les 40 000 présents, mais bien tout un peuple qui aura le cœur plein d’espérance, qu’il nous faut sourire très fort. Notre palmarès est celui-ci : nous n’aurons jamais besoin d’être au summum pour exister. Car même dans l’abîme sportive, dans le chaos d’une décennie sans lueur, nous n’avons JAMAIS cessé de t’aimer, RC Lens. Parce que nous savons tous qu’au-delà de la gloire des beaux jours, il y a ce souvenir d’une banderole un soir de derby à Villeneuve-d’Ascq alors que nous allions à nouveau couler en L2 : « Un club comme Lens ne meurt jamais. » Et que, chacun d’entre nous est une preuve vivante que la prophétie disait vrai. Parce que nous serons à Marseille un dimanche soir, comme nous étions à Clermont-Ferrand un lundi. Quel que soit ton résultat face au LOSC, même si nous ne te cachons pas notre envie de vivre un truc dément samedi. Parce que nous serons toujours là, entourés de nos copains et copines qui ont la chance d’être nés sang et or. Parce que notre plus belle victoire est cette certitude : nous ne marcherons jamais seuls. Un fidèle auditeur de Culture Sang et Or.