CULTURE SANG & OR

L’histoire de la formation lensoise | Partie 4/4

Quatrième Partie : La Gaillette, centre d’excellence

Fort de son titre de champion de France, le RC Lens entre dans une nouvelle ère. Le club dispute pour la première fois la Ligue des Champions, faisant belle figure face à certains ogres du football mondial. Le club atteint même ce qui peut être vu comme son apogée sportive, en disputant la demi-finale de la Coupe de l’UEFA lors de la saison 1999/2000. Le 10 octobre 2002, Gervais Martel inaugure le Centre Technique et Sportif de La Gaillette, en présence de Jean-François Lamour, Ministre des Sports, et Frédéric Thiriez, Président de la LFP. Cet investissement, conséquent à l’époque, a pour ambition de pérenniser le RC Lens sur la carte des grands clubs français en ce qui concerne la formation. Il offre également un cadre de travail de premier plan à l’équipe professionnelle. Les équipements, ainsi que les pelouses synthétiques ou encore le Dôme permettent aux joueurs de s’entraîner de manière optimale, et ce toute l’année. L’historique centre d’entraînement de Tassette laisse place au complexe ultra-moderne de la Gaillette. Le club change de dimension.

Combinée à une politique sportive ambitieuse, et des résultats positifs entre 1998 et 2006, le RC Lens s’impose petit à petit comme un incontournable du football français. L’hebdomadaire France Football publie même une Une sans équivoque, présentant le RC Lens comme le potentiel “géant de demain”.


Dans les faits, le RC Lens ne va pas tout de suite sortir des grands talents. La formation requiert de la patience, un travail méticuleux sur le long-terme et des compétences très précises sur beaucoup d’aspects. On ne s’improvise pas formateur. Et surtout qu’entre 2002 et 2008, le RC Lens va se reposer sur un mercato clinquant issu de l’extérieur. Symbole d’une forme d’emballement de la part des dirigeants de l’époque. Des grands espoirs du football français rejoignent tout de même le RC Lens en post-formation, comme Adama Coulibaly ou encore Alou Diarra. C’est Assou-Ekotto qui est véritablement le premier joueur issu de la Gaillette à réussir à s’imposer dans l’équipe première, avant de rapidement rejoindre l’Angleterre et Tottenham. Le latéral gauche, natif d’Arras, reviendra en France pour terminer sa carrière à Saint-Etienne puis à Metz.

Jonathan Lacourt, considéré comme un tout grand espoir, excelle au poste de milieu relayeur. Il est lancé chez les pros lors la saison 2005/2006, et démontre rapidement toutes ses qualités au milieu de terrain. Il marque son premier but en professionnel contre le Varteks Varazdin, lors d’un match de Coupe Intertoto. Il sera par la suite transféré à Valenciennes, après un prêt à l’ESTAC. La suite de sa carrière sera minée par sa terrible blessure suite au terrible tacle de l’ancien lensois Kader Mangane, qui évoluait alors au Stade Rennais. Jonathan Lacourt a d’ailleurs participé à l’émission Culture Sang et Or, et a répondu à nos questions avec beaucoup de sincérité.

Le cas de Mohamed Diamé est à part. Les médecins du RC Lens détectent des problèmes cardiaques chez le jeune franco-sénégalais, et décident de le laisser libre. Il rebondira à Leganes d’abord, puis au Rayo Vallecano, avant de poursuivre sa belle carrière en Premier League. Diamé compte également 31 sélections avec les Lions de la Teranga. 

Mohamed Diamé, le rescapé de la formation lensoise
©rclens.fr

“La fuite des talents”

En 2007, deux autres grands espoirs décident de quitter prématurément le RC Lens pour des raisons financières. C’est un coup dur pour le club, et sa politique de formation. Présentés comme les premiers très grands talents issus de La Gaillette, Adel Taarabt et Gaël Kakuta décident de rejoindre respectivement Tottenham et Chelsea. Le premier n’aura disputé que deux petits bouts de match avec l’équipe première lors de la saison 2007/2008. Le second a disputé son premier match à Bollaert lors de la saison 2020/2021. Le marocain enchaînera par la suite les clubs, Tottenham, les ambitieux Queens Park Rangers, puis posera ses valises à Milan, Fulham, au Genoa pour enfin de sédentariser au Benfica Lisbonne, club dans lequel il évolue toujours. Kakuta sera prêté par Chelsea, pendant six saisons (Fulham, Bolton, Dijon, Vitesse Arnhem, Lazio, Rayo Vallecano), avant de rejoindre le FC Séville, où il fera banquette, puis le club d’Hebei China Fortune. Il revient en Europe au Deportivo La Corogne et Amiens sous forme de prêt, avant de retourner dans le club de Vallecas, pour faire un énième retour à Amiens. Mais son véritable come-back se fera lors de l’été 2020, lorsqu’il revient chez lui, au RC Lens. Gaël Kakuta réalise une excellente saison pour son retour, rythmée par de nombreux coups d’éclats (11 buts, 5 passes décisives).

Gaël Kakuta, le retour de l’enfant prodige | ©rclens.fr

En 2008, c’est au tour de Timothée Kolodziejczak de quitter prématurément La Gaillette. Le jeune latéral gauche, également promis à un bel avenir, cède aux sirènes lyonnaises et décide de rejoindre le club de Jean-Michel Aulas, alors ultra-dominant dans le football français. “Kolo” lancera véritablement sa carrière à l’OGC Nice, avant de rejoindre le FC Séville, avec qui il remporte les Ligues Europa 2015 et 2016. Il fait deux passages express au Borussia Monchengladbach, puis aux Tigres de Monterrey, avant d’être prêté deux saisons à l’AS Saint-Etienne, club avec lequel il signe définitivement lors de l’été 2020. Kolo a récemment démontré tout son attachement à son club formateur, ayant participé aux enchères concernant la vente d’un maillot de Jean-Guy Wallemme.

C’est à la suite de la descente en L2 que le RC Lens revient à ses fondamentaux, à savoir la formation. Et c’est à partir de cette période que le vivier de La Gaillette commença véritablement à être exploité. L’une des figures du renouveau du RC Lens se nomme Kevin Monnet-Paquet. Faisant la paire avec Razak Boukari, débarqué de Châteauroux, il contribue grandement à la remontée en Ligue 1. Il est alors prêté au FC Lorient, également pensionnaire de L1, club qu’il rejoindra définitivement à la fin de la saison, alors que le RC Lens vit sa seconde descente en L2. Il est actuellement sans club, après avoir été laissé libre par l’AS Saint-Etienne.

KMP, l’une des premières grandes promesses de La Gaillette
©Nord Eclair

Serge Aurier joue son premier match avec l’équipe première un soir de décembre 2009. Le RC Lens reçoit l’AS Saint-Etienne, et le jeune franco-ivoirien est lancé dans le grand bain. Il n’a pas encore 17 ans. Auteur d’une très belle prestation, il s’impose petit à petit comme la meilleure option pour le poste de latéral droit. A la fin de la saison, il reçoit la “Gaillette d’Or”, récompensant le meilleur jeune issu du centre de formation. Lors de la saison 2011-2012, alors que le RC Lens évolue en L2, il quitte le club pour rejoindre le Toulouse FC puis le PSG. Il évolue actuellement à Tottenham. Aurier a revêtu 55 fois le maillot Sang et Or, et compte à date 66 sélections avec la Côte d’Ivoire.

A l’issue de la saison 2010/2011, le RC Lens redescend donc en L2. Avant de quitter ses fonctions d’entraîneur, Jean-Guy Wallemme fait monter Raphaël Varane dans l’équipe première. Le jeune défenseur profitera d’une suspension Alaeddine Yahia pour jouer son premier match en pro, contre le Montpellier Hérault Sporting Club, match durant lequel il se signale par un somptueux contrôle “en porte-manteau”. Varane s’impose dans l’effectif professionnel, jouant même une rencontre au milieu de terrain contre les Girondins de Bordeaux. Le remplacement de Wallemme par Bölöni n’affectera en rien sa progression. Le martiniquais devient même titulaire, et inscrit deux buts contre Caen et Monaco, condamnant par la même occasion ces derniers à la descente en L2. Une nouvelle fois aligné au milieu de terrain, Raphaël Varane porte le brassard de capitaine lors de la réception d’Arles-Avignon (défaite 0-1). Il est alors âgé de 18 ans. Raphaël Varane est aujourd’hui un joueur de Manchester United, après avoir passé 10 saisons au Real Madrid. Il est triple champion d’Espagne, quadruple vainqueur de la Ligue des Champions, et Champion du Monde. Il comptabilise 78 sélections avec l’équipe de France. Boss.

Comme Varane, Geoffrey Kondogbia est également lancé par Jean-Guy Wallemme, remplaçant Maoulida lors d’un match contre l’Olympique Lyonnais un soir de novembre 2010. Il réapparaît dans le groupe sous les ordres de Laszlo Bölöni contre Arles-Avignon, puis lors de la dernière journée à Nancy, étant même aligné par le coach roumain au poste d’avant-centre. Kondogbia devient ensuite un titulaire indiscutable sous les ordres de Jean-Louis Garcia. Il joue 39 matchs au RC Lens, avant d’être cédé au FC Séville lors de l’été 2012. Éternel grand espoir tricolore, il compte 5 sélections avec l’équipe de France. N’ayant été convoqué que pour des matchs amicaux, l’ex-lensois a pu rejoindre la sélection centrafricaine, pour laquelle il a joué 8 fois. Après une saison passée à Séville (2012/2013), Kondogbia rejoint l’AS Monaco, l’Inter Milan, le Valencia CF. Il est aujourd’hui champion d’Espagne avec l’Atletico Madrid sous les ordres de Diego Simeone.

Raphaël Varane, le patron juvénile | ©UEFA.com

Thorgan Hazard a brillé lors du dernier Euro 2020. Et il est un des autres joyaux qu’aura formé la Gaillette. Il a avoué que ses parents avaient décidé de l’envoyer à Lens, et ce afin d’éviter toute comparaison avec son frère aîné. Lancé par Jean-Louis Garcia lors de la saison 2011-2012, il ne dispute que 16 matchs sous le maillot Sang et Or, n’ayant été titularisé qu’à 6 reprises. En proie à de grandes difficultés financières, inhérentes à sa situation sportive, le RC Lens est contraint de vendre Thorgan Hazard à Chelsea, où il retrouvera son frère aîné. Prêté à Zulte-Waregem, puis au Borussia Monchengladbach, il est aujourd’hui un joueur essentiel du Borussia Dortmund et de la sélection belge.

2012 sera l’année du “lancement” de Wylan Cyprien. Le Guadeloupéen épate rapidement par sa qualité technique. Mais c’est lors de la saison 2013-2014 qu’il prend réellement son envol, en compagnie de ses compères Jean-Philippe GBamin et Benjamin Bourigeaud. Les trois joueurs seront des acteurs majeurs de la remontée du RC Lens en L1, sous la conduite d’Antoine Kombouaré. Malheureusement, les défaillances financières de Hafiz Mammadov, propriétaire du RC Lens, vont contraindre le RC Lens à évoluer avec un effectif réduit en L1. Les rencontres se déroulent au stade de la Licorne d’Amiens, et au Stade de France. Cette situation difficile offre une véritable exposition aux trois jeunes joueurs, qui emmagasinent une expérience. L’issue de la saison est toutefois connue de tous. Lens descend une nouvelle fois en L2, et Cyprien, Bourigeaud et Gbamin se voient offrir l’occasion de terminer leur formation dans un contexte plus favorable, en Ligue 2.

B.Bourigeaud, l’âme de la Gaillette | ©rclens.fr

Durant cette saison 2015/2016, les trois jeunes espoirs ne réussissent pas leur mission, à savoir faire remonter en L1 un RC Lens qui avait conservé l’ossature de la précédente saison, ainsi que son coach.Toutefois, Bourigeaud se signale par une grande saison illustrée par son but dans les arrêts de jeu à Valenciennes, Gbamin par sa tête victorieuse à Gerland en Coupe de France, et Cyprien par une fin de saison en boulet de canon. A la fin de l’exercice, ils seront vendus respectivement à Rennes, Mayence et Nice.

Le RC Lens parvient à conserver ses trois jeunes pépites en Ligue 2 grâce à la vente d’autres espoirs. En effet, Yassin Fortune et Jeff Reine-Adélaïde sont cédés à Arsenal dès le printemps 2015, rapidement suivis par Cavaré (Rennes) et Guillaume (en face). Pour les deux premiers cités, l’argent est même encaissé avant l’ouverture du marché des transferts, ce qui permet au RC Lens de présenter un budget à la DNCG, et de conserver Bourigeaud, Cyprien et GBamin une saison supplémentaire. Yassin Fortune joue actuellement en Suisse (Sion) quand JRA enchaîne les grosses blessures, et voit sa carrière au point mort.

Globalement, le RC Lens en L2 ne peut conserver les meilleurs éléments issus de la Gaillette. Au point qu’un joueur qui évolue une dizaine de fois avec les pros devient une solution à l’angoissante équation budgétaire que les dirigeants doivent résoudre devant la DNCG à chaque sortie de printemps. Modibo Sagnan est ainsi vendu à la Real Sociedad, quelques mois après que William Bianda ait été transféré à l’AS Roma. Plus récemment, Jean-Ricner Bellegarde (RC Strasbourg) et dans une moindre mesure Mounir Chouiar (Dijon FCO) ont été « sacrifiés » sur l’autel de la DNCG.

Jean-Ricner Bellegarde, le dernier sacrifié ? | ©FootMercato

Le RC Lens est de retour en Ligue 1, et cela change forcément la donne. Les comptes sont désormais au vert, ce qui permet aux dirigeants d’être beaucoup plus projectifs dans la gestion des jeunes joueurs issus de la Gaillette. Va-t-on enfin assister, près de 20 ans après son inauguration, à une exploitation totale du potentiel de ce centre sportif de premier rang ? Il est fort à parier que les jeunes Oudjani, Boura, Louveau, Pereira Da Costa, Kembo, Baldé, et autres Cissé se verront offrir une place avec l’équipe première dans les prochains mois. La Gaillette aura permis au RC Lens de survivre lors de la “décennie noire” des années 2010. Désormais en L1, le club Sang et Or compte désormais en faire un atout sportif.

A retrouver
La partie 1/4 est à retrouver > ici
La partie 2/4 est à retrouver > ici
La partie 3/4 est à retrouver > ici

Article écrit par Antoine

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