CULTURE SANG & OR

L’alignement des plans nets

Presque passée inaperçue, la sortie d’Arnaud Pouille dans la Voix des Sports de lundi est venue clôturer le mercato d’hiver 2022. Elle aura permis de calibrer, une nouvelle fois, le projet du RC Lens. Le mot clef étant toujours « pérennisation ». Il ne peut y avoir d’ambition sans continuité, et quand bien même le RC Lens a réussi 18 mois de haute facture pour un “néophyte”, le moyen-terme passera avant tout par une consolidation des acquis à court terme. L’objectif d’apparaître en haut du classement n’est pas évoqué, ou plutôt, est relativisé. “La loi des grands nombres”. D’un point de vue économique, le Racing est encore loin des locomotives du football français. En fait, le RC Lens a déjà retrouvé sa place naturelle. Le deuxième chapeau. En quinze ans, la L1 a certes évolué ; Bordeaux, Saint-Etienne et Nantes ont perdu du galon, Nice et Rennes se sont épaissis, le PSG régnant désormais quasi sans partage. Mais globalement, il y a toujours ce bloc de clubs forts, qui domine l’élite du football hexagonal. Un club que le RC Lens avait réussi à rejoindre à la fin des années 1990, pour le quitter brutalement une décennie plus tard. 

(crédit : francebleu.fr)

Chacun d’entre nous rêve secrètement de voir le club s’asseoir de nouveau sur le strapontin qui fut jadis le nôtre. Et certainement que le premier à en avoir envie est celui qu’Arnaud Pouille décrit comme la seule personne véritablement indispensable au projet du RC Lens : Joseph Oughourlian. Mais pour ce faire, de nombreuses étapes sont encore à franchir. Et la première est cette sacro-sainte pérennisation, qu’Arnaud Pouille a jugé bon de rappeler. “On a cru qu’on avait passé certaines étapes, alors que structurer des fondations, ça prend beaucoup de temps”, précise le boss opérationnel du football Sang et Or. Oui, et dans le football, le temps ne sera jamais dix-huit mois. Se décrivant comme “fermier”, Pouille enchaîne son interview avec la volonté de minimiser le rôle du “hasard” dans la réussite actuelle du club. On le voit depuis de nombreux mois, le RC Lens s’est transformé, la mutation a été profonde, et a permis aux parties prenantes d’adopter quasiment tous les outils et méthodologies indispensables pour tutoyer de nouveau le haut niveau. Au point d’être régulièrement cité en exemple par les médias, qui placent le RC Lens comme un prétendant à l’Europe. L’objectif de redonner du “crédit à l’institution” est bel et bien en passe d’être réussi.

La saison prochaine verra l’élite passer de 20 à 18 clubs

Quand on lui parle d’Europe, Arnaud Pouille précise : “peut-être qu’un jour on y arrivera (…) mais se fixer ça comme objectif institutionnel quand on est le 15e budget de L1 (…) non”. D’un revers de main, le Directeur Général écarte toute pression du résultat ajoutant que le “trading” (ndlr : comprenons, un bouleversement systématique de l’effectif) ne fait pas partie de la stratégie. La croissance est et sera raisonnée, et le mercato estival devrait venir accompagner la croissance économique du club sans pour autant affecter outre mesure le sportif. Mieux, en plus d’anticiper les futurs départs, la clôture du mercato hivernal va permettre “d’enclencher les prolongations de ceux dont le contrat se termine en 2023 (…) et qui veulent s’inscrire dans la durée”. Le RC Lens va désormais pouvoir préparer sereinement sa prochaine saison.

Mais l’équipement ne fait pas tout. L’attitude dégagée par le club est tout aussi primordiale. Et en ce sens, la stratégie de jeu prônée par Franck Haise et son staff convient en tout point au développement du RC Lens en L1. Le premier objectif, à savoir de maintenir le club en L1, est en passe d’être doublement réussi. Les fondations ne sont certes peut-être pas encore suffisamment solides pour prétendre à l’Europe, mais elles permettent de se projeter avec sérénité, d’autant plus que la saison prochaine verra l’élite passer de 20 clubs à 18 clubs. Discours qui trouve écho dans les récentes déclarations de Franck Haise. Le rouennais s’est récemment épanché sur le moyen-terme en conférence de presse, usant de mots clefs à forte consonance bâtisseuse. “Vous espérez qu’on joue la Ligue des Champions mais on construit, on essaye juste de faire avancer le club chaque jour”. 

Le football au service de l’ambiance. La performance au service des résultats. (crédit : iconsport)

Le plan de route défini par la direction et la stratégie de jeu définie par Franck Haise se nourrissent mutuellement. La fameuse relation “cinq étoiles” entre les dirigeants et le sportif. Les premiers permettent, via leurs projections, à l’entraîneur lensois et son staff de pérenniser ce projet de jeu qu’ils pensent être idéal. Une philosophie de jeu protagoniste qui est forcément plus exigeante et difficile à mettre en place qu’une alternative basée sommairement sur l’exploitation de la faille adverse. Le RC Lens se donne le temps de ses ambitions, sans brûler les étapes. Et la perspective de voir des investisseurs rejoindre l’aventure afin de briser un éventuel plafond de verre semble désormais réelle. 

Cette attractivité, cette visibilité accrue dans le paysage footballistique français, passe autant par la façon dont les bons résultats sont obtenus que par la traditionnelle reprise des Corons par Bollaert en début de seconde mi-temps. Les temps ont changé. Désormais, le football se met au service de l’ambiance. Le beau jeu au service des résultats. L’humilité au service de l’ambition. A tous les étages de la fusée, l’alignement des plans nets.

Écrit par Antoine

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