Le public de Bollaert est-il un atout ? Cette question revient depuis des années. En marge du derby, encore plus. Le public lensois est-il encore traumatisé par la décennie noire sportive dont il semble enfin s’extirper ? Les fantômes de la saison précédente hantent encore toutes les têtes. Les déroutes resteront des tâches indélébiles sur ce si soyeux tissu qu’a été notre saison passée. Beaucoup auraient sûrement troqué quelques places au classement pour au moins une victoire dans la double confrontation contre Lille.
RC Lens – LOSC, une rivalité quasi centenaire que nous aurions quelque peu oubliée ? Une rivalité que nul ne peut minorer. Et qu’il faut encore moins chercher à contrôler.
La saison dernière, la pandémie nous a tenu loin des nôtres. Loin des travées de Bollaert. Les matchs se vivaient dans les canapés, dans un état de solitude difficilement compatible avec la ferveur habituelle qui réside dans les tribunes de Bollaert. D’accoutumée si colorées et bruyantes, ce ne sont que quelques banderoles silencieuses, même si éloquentes, qui peuplaient les tribunes faisant face aux joueurs. Celles qui d’habitude envoient les watts pour électrifier son onze de cœur. Ou l’électrocuter.
La saison passée, lors des deux confrontations contre l’ennemi juré, les foules se sont déplacées et ont manifesté avec force leur soutien aux joueurs et au staff. Nous avons tous en tête les images incroyables de l’escorte du bus des joueurs jusqu’aux confins du 59. Un brasier auréolé de feux d’artifices improvisés sur les ponts de la D917. Quelle fête ! Pour une sévère défaite. On se rappelle de la mobilisation populaire qui a précédé le match retour. Celui de la revanche. Le RC Lens semblait mieux armé pour vaincre celui qui se dirigeait vers son quatrième titre de champion. Nouvelle déroute.
La ferveur parfois incontrôlée de Bollaert peut-elle se retourner contre le RC Lens ? Cet atout maître qui est présenté à chaque joueur convoité peut-il s’avérer être un ponctuel handicap ? Des voix se sont élevées en ce sens. « Arrêtons de mettre la pression aux joueurs », a t-on pu lire et entendre çà et là. Ces vagues successives de soutien, plutôt rares dans la France du football, ont semblé être une des causes des deux déroutes lensoises. Selon nos informations, elles ont effectivement tenu un rôle non-négligeable chez certains joueurs, qui auraient joué le match avant le coup d’envoi de la rencontre. Dans une certaine mesure, cette théorie se tient donc.
A Lens, la passion se vit au quotidien. Que ce soit dans les tribunes, dans les galeries commerciales, à la boulangerie du quartier, sur les réseaux sociaux, et même dans ce papier. Ne pas avoir de passion exacerbée avant, pendant et après un derby, cela ne saurait être compatible avec ce que nous sommes. Le public lensois n’a jamais su rester sobre, pour le meilleur et pour le pire.
Le Nord-Pas-de-Calais est une terre de football, le RC Lens et le LOSC en sont les deux locomotives. Les joueurs, le staff, le club dans son entièreté, sont dans l’obligation de s’accommoder, et même de s’approprier cette pression indissociable de ce club si populaire qu’est le RC Lens. De cette pression indissociable de ce match qu’est le Derby du Nord, depuis trop longtemps disparu du paysage footballistique français. Les joueurs doivent être en mesure de vivre pleinement l’événement, et d’utiliser les forces électrisantes qui émanent de son Temple pour renverser cette montagne devenue colline.
Nier le fait que notre ferveur ait pu impressionner nos joueurs ne pourrait avoir raison. Mais renier ce qui fait battre notre cœur devant l’éternel n’en serait que trahison.
Mettons le feu.
Ecrit par Antoine