Jean-Guy Wallemme était l’invité de l’épisode 26 de l’émission Culture Sang et Or. L’ancien capitaine du RCL parle de son actualité, de ses souvenirs sous les couleurs du Racing et d’un certain Guy Roux.
Thomas Deseur : Que pensez-vous du système de jeu, à 3 défenseurs, pratiqué par le Racing Club de Lens ?
Tous les entraineurs ont des projets de jeu et je n’aime pas trop parler de système. Franck Haise a eu l’intelligence de jouer avec les qualités de ses joueurs et de composer avec les atouts qu’ils pouvaient avoir et la plus-value de 3 défenseurs avec 2 pistons qui jouent bien leur rôle en plus d’un certain apport offensif et d’un bon repli défensif.
Est-ce problématique, pour le Racing Club de Lens, de ne pas réussir à bloquer un duo d’attaquant où seul Florian Sotoca paraît indéboulonnable ?
A la vue du classement actuel il n’y a pas de problématique. On serait dans l’urgence si nous étions plus bas. Ce qui m’inquiète toujours un peu, c’est le fait que cette équipe prend trop de buts. Elle a toujours su renverser certaines situations et mettre plus de buts que l’adversaire, mais il y a tout de même des erreurs individuelles comme collectives. Il y a de la matière avec des axes de progression et on ne peut pas faire la fine bouche à la vue de ce que l’on peut voir, surtout avec des joueurs qui en grande majorité ne connaissent pas ce niveau de la Ligue 1.
TD : Etes-vous surpris par l’élimination du Racing par une équipe jouant deux divisions plus basses ?
Non, il y a un autre exemple avec l’Olympique de Marseille (défaite 2-1 contre Canet-Roussillon). Maintenant, les championnats amateurs se professionnalisent, alors pas dans les installations mais dans l’état d’esprit. Aujourd’hui, beaucoup de garçons ne travaillent plus et ont l’esprit tourné à 100% vers le football. Par rapport à Lens, il va falloir que la régularité soit sur l’exigence et sur la nouvelle image qu’a le club avec le classement. Il n’y a plus d’effet de surprise. Chaque joueur s’était préparé à jouer le haut niveau, et c’est une préparation très spécifique.
La défaite contre le Red Star, est-elle une défaite à ne pas relativiser ?
Il y a une problématique autour du temps de jeu de certains joueurs qui joueront certainement moins à la suite de cette élimination. Là, il faudra plus une certaine exigence dans le timing et dans la durée pour maintenir cette place au classement. Il faudra qu’ils restent concernés pour répondre présents au moment où on fera appel à eux.
Si on excepte le titre de 98, quel est votre plus beau souvenir au RC Lens en tant que joueur ?
Mon plus beau souvenir serait le moment où l’on est remonté au moment des barrages contre le Toulouse FC en 1991. Le stade était rempli alors que nous avions perdu le match aller 4-0. Ensuite, mon autre beau souvenir serait la qualification pour la coupe d’Europe en 1995 avec Patrice Bergues.
Et votre pire souvenir ?
J’aurais aimé finir sur un titre en 2002 à Lyon. Même s’il faut être objectif, en début de saison nous n’étions pas programmés pour finir en Ligue des Champions.
Vous avez connu l’équipe de France A’, mais vous n’avez jamais été sélectionné en A, est-ce un regret pour vous ?
Oui c’est un regret, car en jouant au haut niveau on se fixe des objectifs réalisables et celui-ci en était un. L’année où j’aurai pu l’être Aimé Jacquet a fait des choix, et il a eu raison puisqu’il finit champions du monde. Pourtant j’étais dans ses petits papiers suite à différentes discussions que l’on a eues avec lui et Patrice Bergues. Il y avait eu beaucoup de concurrence, puisque même un axial comme Thuram a fini arrière droit.
Quel a été votre meilleur partenaire dans l’axe ? Celui avec qui vous vous sentiez en confiance.
Il y en a plusieurs, que ce soit Cyril Magnier ou Fred Déhu. Ceux sont ces garçons là avec qui j’ai eu les plus belles années, même si quand j’ai commencé je jouais avec Didier Sénac ou Francis Gillot.
Quel est le joueur lensois qui vous a le plus impressionné dans votre carrière ?
Venancio Ramos, qui est un uruguayen arrivé en 1984. C’est le premier à avoir fait le coup du foulard dans un match contre l’OM. Vraiment un joueur qui m’a marqué par son talent et sa finesse technique.
En 1998, lors du match Lens-PSG, j’ai cru apercevoir un système de jeu assez identique à celui d’aujourd’hui avec 3 défenseurs et des pistons…
C’était un mix où nous étions en zone avec un certain équilibre. Je l’ai revu il n’y a pas longtemps et le rythme que nous avions mis lors de ce match… Les parisiens n’ont pas compris ce qui leur arrivait, car même à 3-0 on essayait de mettre le quatrième.
On parle beaucoup de la qualité technique de l’équipe de 1998, notamment avec Stéphane Ziani et Vladimir Smicer, mais cette équipe avait aussi d’énormes qualités physiques pour répéter les efforts…
Tous les joueurs faisaient des efforts, je pense à Tony (Vairelles) et Vladimir (Smicer). Et derrière tu as Antho Drobnjak, qui ne faisait pas forcément tous les efforts, mais par contre il mettait les ballons au fond. Je me souviens même de Rolland Courbis qui n’en veut pas à l’OM en disant que ce n’est pas l’attaquant qu’il lui faut.
L’arrivée de Jacques Santini est-elle de ton fait ? Est-ce un regret pour toi la fin de cette aventure, car vous n’étiez pas largué ?
Je n’arrivais plus à tirer cette équipe vers le haut, pas autant que je l’avais fait sur les 2-3 saisons précédentes. On disait que c’était facile d’être remonté, mais ça ne l’était pas tant que ça, j’avais 35 joueurs sous contrat et qui ne voulaient pas jouer en Ligue 2 avec 35 millions d’€ de déficits.
Avec un Vedran Runje, je savais que je pouvais aller à la guerre. On avait un super staff avec Christophe Delmotte, Michel Ettorre et Cyril Moine. Ensuite est arrivé Dominique Cuperly qui a fini notre apprentissage à Christophe et moi. Lors de la 3ème saison, Dominique Cuperly m’a dit : « On a fait un miracle en se sauvant, on n’en fera pas deux, donc je m’en vais sur une bonne note ». Pour Jacques Santini, bien sûr que j’ai donné mon aval et que j’ai cautionné. C’est un entraineur champion de France, sélectionneur… Je voulais m’abreuver de son savoir. Ensuite, comme il n’y a pas eu d’organigramme clair, des tensions sont nées, les joueurs en ont profité… Le point culminant se trouve à Sochaux où 2 joueurs se prennent le bec.
Mes valeurs n’étaient pas en corrélation avec ça et je ne pouvais cautionner, il fallait donc que je parte. Tout comme le fait de titulariser Serge Aurier où j’ai eu des contradictions par rapport à ça, qu’il allait avoir Dimitri Payet en face de lui. J’ai répondu qu’il allait s’en sortir et que si je ne m’appuyais pas sur ce jeune maintenant, le centre de formation on pouvait le brûler, il ne servait à rien.
En tant qu’entraîneur, comment se fait-il que tu n’aies pas réussi à te maintenir au niveau professionnel ?
Peut-être parce-que je n’ai pas fait les choses à faire au moment où il fallait. J’aurais aimé rester à Lens un peu plus longtemps et ça n’a pas pu se faire. Je suis ensuite parti à Auxerre, en étant sélectionneur du Congo en même temps, et notre ami Guy Roux a fait des choses pour que ma carrière ne soit pas aussi belle que la sienne, même si on sait surtout ce qu’il n’a pas fait à Lens. On s’est pris le bec et je suis parti.
Depuis que je suis parti, Auxerre est toujours en L2 et Guy Roux est toujours là-bas alors que c’est la politique de la terre brûlée, car il ne souhaite pas que l’on réussisse derrière lui. Ce qu’il a fait à Auxerre, personne ne peut lui enlever, le critiquer, mais quand on se remémore on l’a annoncé sélectionneur de l’Equipe de France, au PSG et à Monaco et il n’est jamais allé dans ces clubs-là. La seule fois où il est sorti d’Auxerre c’est pour venir à Lens avec ce qu’on connaît de ce qu’il a fait, mais surtout de ce qu’il n’a pas fait. Quand j’étais au Congo, il n’hésitait pas à critiquer mon travail à Auxerre parce-que je n’étais pas là et derrière il m’a fermé les portes et c’est pour ça que je suis parti à l’étranger. Après tout n’est pas de sa faute, car j’ai fait des erreurs et il y a du monde au balcon avec de nouveaux arrivants comme Franck Haise qui fait un travail génial et je suis content pour lui.
Un gars comme Eric Sikora aurait pu mériter un autre sort également, mais des entraineurs il n’en faut qu’un par club.
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