Début janvier, le corps est gras, la mine patibulaire. On se malaxe les bourrelets, peinant déjà à assumer les bonnes résolutions qu’on s’était jurées de suivre. Et voilà que se ramène la galette des rois, pâtisserie qui règne en maître incontesté dans le royaume de la calorie. Outre le fait que les jours commencent à rallonger, une autre éclaircie pointe le bout de son nez et réchauffe les cœurs : la Coupe de France. Alors que l’année passée, le RC Lens avait dû s’employer pour sortir son rival de toujours, le tirage de l’édition 2022/2023 semble avoir été plus clément. Les hommes de Franck Haise, qui ont redémarré le championnat tambour battant, se rendent ce weekend dans le 91 afin d’y défier l’Entente Sportive et Athlétique de Linas-Montlhéry, pensionnaire de N3, cinquième division nationale. Présentation avec Arnaud Detout, journaliste au service des sports du Parisien.
L’ESA Linas-Montlhéry est un club qui aime la Coupe de France. Comme nous le présente Arnaud Detout, du service des sports du Parisien : “il faudrait vérifier dans les annales mais il me semble que ce n’est pas arrivé souvent qu’un club de N3 se qualifie trois fois pour les 32ème de finale de la Coupe de France”. En effet, le club essonnien, qui représente les villes de Linas et de Montlhéry suite à l’union des clubs de football de ces mêmes-villes en 1960, est coutumier de la surprise. Il y a trois ans, il recevait déjà le PSG à Robert Bobin pour un match de gala perdu 6 à 0. Cette année, c’est le Racing Club de Lens qui sera la tête d’affiche.
Un match qui ne fait pour autant pas le plein. Les dirigeants ont vu un peu grand, comptant sur le déplacement massif des supporters lensois, “comme à Charléty pour le barrage contre le Paris FC”. Les dirigeants, qui tablaient sur 10,000 spectateurs “dont environ 3,000 lensois”, ont reçu pour l’heure un peu plus de 1,000 demandes côté Sang et Or. Des achats de place au dernier moment sont toutefois attendus, puisque Linas-Montlhéry sera le seul club francilien qui jouera en région parisienne ce week-end.
Peux-tu nous présenter l’ESA Linas-Montlhéry ?
“C’est un club issu d’une fusion entre deux villes, Linas et Montlhéry, qui, pour mutualiser les forces, se sont rapprochées pour créer ce club de football qui a été pendant de nombreuses années en DHR, ou PH, entre le septième et neuvième échelon national. Puis il y a de nombreuses montées successives pour atteindre la DH, puis la N3. C’est une belle réussite, sans avoir de gros moyens. Ils étaient assez réguliers en N3, jusqu’à cette saison où c’est un peu plus compliqué.”
Comment se déroule la saison de l’ESA Linas Montlhéry ?
“Comme tu as pu le voir, Linas-Montlhéry est dans la zone rouge depuis la première journée, et cette saison, ce sont les cinq derniers du championnat qui sont relégués. Il leur faut absolument finir dans les neuf premiers. La victoire contre les Mureaux avant les fêtes leur a fait du bien, mais clairement, l’objectif du club cette année est de se maintenir en N3. La Coupe de France sera une parenthèse.”
Y a-t-il un ADN formateur à Linas-Monthléry, comme c’est le cas dans de nombreux clubs de région parisienne ?
“Oui, c’est un club qui travaille bien au niveau de la formation. Parmi les joueurs professionnels passés par Linas-Montlhéry, je peux citer Tanguy Ndombele, ou encore Yoane Wissa, qui s’est fait connaître à Lorient et qui joue à Brentford depuis deux ans (ndlr : également, Paul Bernardoni, Paul-Georges Ntep ou encore William Rémy, vieille connaissance artésienne). C’est un club qui essaie de former sans gros moyens. Il n’y a pas de mécène ou de sponsors. Et depuis quelques années, c’est un club qui a su se faire connaître par ses parcours en Coupe de France.”
Peux-tu nous parler de ces récents exploits ?
“Déjà il y a trois ans, Linas-Montlhéry avait connu une première épopée avec ce 32e de finale contre le PSG, même s’ils n’avaient pas accroché d’équipes professionnelles à leur tableau de chasse. L’année dernière, l’ESA s’est qualifié contre Dunkerque (L2), avant de sortir Evreux (N3 aujourd’hui en N2), puis de réaliser l’exploit contre Angers SCO (2-0). Il y a ensuite eu ce 32ème de finale épique contre Amiens SC (L2), où ils sont menés 3 à 0 à vingt minutes de la fin, et réussissent à inverser la situation en inscrivant trois buts en fin de rencontre, pour finalement se faire éliminer aux tirs au but. Cette saison, les essonniens ont déjà réalisé un exploit en éliminant le Paris 13 Atletico, qui joue en N1, soit deux divisions au-dessus.”
Le match aura lieu au stade Robert Bobin de Bondoufle.
“Robert Bobin est un stade qui a un peu été mis à l’abandon, avant que les féminines de Juvisy, puis du Paris FC s’y installent (ndlr : avant de déménager à Charléty). C’est également une terre d’exploit, puisqu’en 1995, on se rappelle du FC Saint-Leu VO 95 qui avait éliminé le grand FC Nantes aux tirs aux buts. C’est un stade beaucoup plus grand que le stade Paul Desgouillons et sa pelouse synthétique où joue habituellement Linas-Montlhéry, et où le Angers SCO était tombé la saison passée.”
Trouve-t-on des anciens professionnels dans l’effectif ?
“Parfois il y a des anciens pro qui viennent en N2 ou N3. Dans cette équipe, il y a surtout des joueurs qui viennent de DH ou N3. Parmi les joueurs qui se détachent du lot, on peut parler de Pascal Leno, le capitaine de cette équipe et qui avait inscrit un doublé contre Angers la saison passée. Devant, il est accompagné de Tom Bouvil (ndlr : ancien de la réserve du PSG), qui va très vite, et qui avait notamment surpris les angevins la saison passée. Derrière c’est solide. Globalement, c’est une équipe solidaire. D’ailleurs, il n’y a pas de hasard, quand tu arrives à faire des parcours en Coupe de France, c’est que forcément il y a une bonne ambiance dans le vestiaire.”
Comment Linas-Montlhéry a préparé ce 32ème de finale ?
“Les joueurs ont coupé, ils n’ont pas fait d’entraînement pendant les fêtes de Noël. Leur objectif c’est vraiment le maintien en N3, donc leur reprise a été faite avec le championnat en point de référence. Cette semaine, ils ont fait un amical contre Montargis, ils se sont entraînés jeudi et depuis aujourd’hui (ndlr : vendredi) ils sont au vert à l’Espace Léonard de Vinci de Lisses, complexe hôtelier où se rendent souvent les équipes ultramarines qui viennent disputer un tour de Coupe de France en métropole. Il y aura un réveil musculaire le samedi avant d’aller rapidement au stade Robert Bobin de Bondoufle”
Comment les joueurs appréhendent ce match ? J’imagine que l’effectif est composé de supporters du PSG. Il y a un petit clin d’œil du destin, avec la possibilité pour des supporters de venger les joueurs qu’ils suivent au quotidien ?
“On pourrait le penser oui. Mais je ne pense pas trop. Le plus gros supporter du PSG dans cette équipe c’est l’entraîneur, Stéphane Cabrelli, qui est abonné au Parc des Princes depuis une bonne vingtaine d’années. Les joueurs eux seront dans le plaisir. Ils savent que ça sera beaucoup plus compliqué que face à Angers SCO par exemple. Jimmy Cabot a d’ailleurs sûrement prévenu ses nouveaux coéquipiers. Ils savent que Lens est un rouleau compresseur. Je ne dirais pas qu’il y a de la résignation, mais l’écart est vraiment grand. Les joueurs de Linas-Montlhéry y vont pour profiter et prendre du plaisir devant au moins 8,000 personnes. Peut-être que si Lens fait tourner son effectif, des possibilités se présenteront. Mais les joueurs sont réalistes, et savent que les chances seront très réduites. Mais le fait d’avoir déjà affronté cinq équipes professionnelles en l’espace de trois ans réduira peut-être l’appréhension et l’inhibition des joueurs de Linas. Comme toutes les équipes amateurs qui jouent des professionnels, et sachant que les prolongations ont été supprimées depuis trois ans, l’objectif de Linas sera de tenir et d’amener l’équipe de Lens à la séance de tirs aux buts, domaine dans lequel ils excellent.”
Un grand merci à Arnaud Detout, journaliste au Parisien, pour sa disponibilité.