CULTURE SANG & OR

Jeremy Agbonifo, l’intenable Suédois

L’ailier suédois Jeremy Agbonifo, un gaucher qui évolue à droite, fait le voyage vers Lens après avoir secoué plus d’un défenseur dans son pays. Présentation d’un quasi-inconnu qui représente un gros pari pour les Sang et Or.

Photo Göteborgs-Posten
La surprise du chef

C’est le joueur dont personne n’attendait qu’il atteigne aussi vite un tel prix sur le marché. Transfertmarkt lui attribuait une valeur marchande de 3,5 millions d’euros, au vu de son potentiel d’international Espoirs. Or, quand le quotidien Expressen a donné le scoop des négociations autour de ce joueur de 19 ans, des sources ont évoqué un montant faramineux, à l’échelle suédoise, d’un peu plus de 80 millions de couronnes, soit plus de 7 millions d’euros. « Gros transfert inattendu », commentait le journal. « La transaction pourrait constituer une vente record pour le club », à peine plus chère que pour un autre attaquant suédois né en 2005, Momodou Sonko, recruté par La Gantoise il y a un an.

Le BK Häcken, club de la deuxième ville de Suède, Göteborg, évolue à l’ombre de son voisin, l’IFK Göteborg, dans un stade d’un peu plus de 6 000 places, et n’exporte pas souvent son actualité au-delà des frontières. Qui a entendu parler du premier titre de champion de son histoire, en novembre 2022 ? C’était pourtant un exploit retentissant au niveau national. Hélas, en Ligue des champions 2023-24, Häcken n’allait passer qu’un tour préliminaire avant de tomber aux tirs au but face aux champions des îles Féroé, Klaksvík. « Un fiasco » selon la presse suédoise, suivi d’un désastre peut-être pire encore : zéro point en six matchs de poule d’Europa League, avec dix-sept buts encaissés.

Jeremy Agbonifo, élément intéressant en vue de la reconstruction de Häcken, n’avait pas participé à cette campagne : il évoluait à l’époque au FC Porto. Il a en revanche joué lors de la Conference League 2024-25, où Häcken a chuté au dernier tour préliminaire, tout comme un certain Racing Club de Lens. Et même dans sa ville natale, cet enfant d’immigrés nigérians est considéré comme un joueur ayant encore besoin de s’aguerrir. Son club s’arrêtait sur sa progression en septembre, après qu’il eut disputé son premier derby de Göteborg. À domicile, titulaire lors d’un nul 3-3, il avait alors apporté une contribution décisive sur le premier but des jaune et noir en mettant toute son agressivité pour récupérer le ballon au milieu.

UN garçon placide

Agbonifo apparaît comme un garçon placide devant la caméra, réticent à dire « je » et parlant du collectif quand on lui demande de commenter son apport à l’équipe. Avant de lâcher : « Mais moi-même, je pense que j’ai eu une prestation individuelle vraiment convenable. À mesure que le match avançait j’ai été assez menaçant et j’ai aidé l’équipe autant qu’il fallait, tout simplement. » Explosif, adepte des dribbles dans les petits espaces, toujours partant pour les duels au corps à corps, intenable dans ses meilleurs jours, il est pour sa Fédération l’un des talents à suivre de près, dans une Suède qui manque de ce type de profil sur les côtés. Car Agbonifo pourrait théoriquement revêtir le maillot du Nigeria, même s’il n’a jamais évoqué cette possibilité. Il est appelé dans les sélections de jeunes de la SvFF (la Fédération suédoise de football) depuis fin 2022, et a honoré sa première sélection Espoirs U21 en entrant en jeu contre la République d’Irlande en novembre dernier (victoire 2-0).

Avant d’en arriver là, il est passé par un long détour à Porto, qui l’avait repéré dès ses 15 ans parmi les jeunes pousses de Häcken. Pas difficile, car comme le rappelle Expressen, c’était un « serial buteur » en Allsvenskan (le championnat de Suède de football) U17 : il partait alors avec treize pions dans la musette lors de ses quatorze dernières rencontres. Toutefois, au Portugal, son aventure de plus de deux ans aura été mitigée. Il a finalement choisi de retrouver sa famille à l’hiver 2024. « Il faut être réaliste », déclarait-il alors au quotidien Göteborgs-Posten, constatant qu’il était barré par la concurrence chez les Dragões. Mais des bouts de match disputés en Youth League, c’est toujours bon à inscrire sur un CV.

À Lens, il devra monter une marche qui est assez haute pour permettre à Will Still de proposer deux joueurs symétriques sur les ailes. Le niveau des défenseurs latéraux en Ligue 1 n’a en effet pas grand-chose à voir avec celui de l’Allsvenskan. Et la comparaison avec un Anass Zaroury, plus expérimenté après son passage par la Premier League, paraîtra peut-être difficile à tenir. Mais à 19 ans et quelques mois, Jeremy Agbonifo ne peut que nous surprendre en bien.

Vous souhaitez partager l'article ?
Retour en haut