Frustrés
A la fin de l’émission #9 dans laquelle nous avons pris beaucoup de plaisir à débriefer le match (à revoir ici), une forme de frustration nous habitait. Oui, de ce match Olympique de Marseille – RC Lens, nous aurions pu en parler pendant des heures. Avec quelques bouteilles d’eau en renfort, ce débrief aurait pu se transformer en véritable nocturne. Une ode au beau football. De ce match, on en parlera certainement encore pendant de nombreuses années, tant la performance des nôtres a été à ce point proche de la perfection.
Frustrés par une défaite très amère contre le RC Strasbourg, les hommes de Franck Haise ont donc réussi à enchaîner très rapidement et préparer ce déplacement de toutes les craintes sportives : la cité phocéenne et la dynamique assez folle qui habite l’Olympique de Marseille de Jorge Sampaoli depuis le début de saison.
Les médias ont pour habitude de parler des grands de ce monde. L’audimat est la règle. Mais il faut reconnaître que l’OM de Sampaoli n’a pas usurpé toutes les attentions qu’elle a reçues depuis le début de la saison. Le jeu proposé par les Phocéens peut ne pas plaire à tout le monde, mais il a au moins le mérite d’être « hors-normes » par rapport à ce que l’on voit en France. Attention, je ne dis pas que c’est forcément mieux, mais absolument différent. Jorge Sampaoli est un argentin dans sa plus belle définition, la personnification de Martin Fierro, une dégaine débonnaire qui semble sur le point d’entrer en éruption à chaque instant. Ses tatouages lui donnent un air de jeune en pleine rébellion contre un ordre établi, et ses mouvements incessants sur le banc de touche un air de capo de barra brava porteño. Le jeu de l’OM de Sampaoli ? C’est à peu près pareil : un tourbillon d’énergie organisé dans sa désorganisation. Une opposition passive a toutes les chances de couler face à cet océan déchaîné. L’OM 2021/2022, un tsunami tactique au bord de la Méditerranée.
Suite à la défaite de mercredi contre Strasbourg, nous avions légitimement toutes les raisons de craindre ce périlleux déplacement. Mais Franck Haise l’a précisé : « les séances de yoga ont fait du bien ». Réducteur ? Peut-être pas. La méthodologie du coach normand ne laisse absolument rien au hasard. Tant sur les plans tactique, technique, physique ou psychologique, le RC Lens se prépare pour être acteur protagoniste chaque semaine, qu’importe l’adversaire qui se dresse face à lui. L’opposition entre deux génies tactiques n’a pas échappé au diffuseur Amazon Prime, qui a fait de cette rencontre son match du dimanche soir. Bien lui en a pris.
Get Franck Haised
A la furie Sampaoliste, Haise répond par une précision tactique se rapprochant plus de l’horlogerie suisse que de la ligne Maginot. Une « partizado » comme on dit dans les pays hispanophones. Une opposition en tout point exceptionnelle que tout supporter du RC Lens se doit de revoir, et d’ancrer au plus profond de sa mémoire. Toute la communauté lensoise s’est plus ou moins posé la même question au sortir de ce fantastique show du dimanche soir : « depuis quand le RC Lens n’avait-il pas proposé pareille prestation ? ». Ce match peut regarder le RC Lens – Paris SG du 15 mars 1998, de par l’intensité exceptionnelle dégagée par les deux acteurs, les occasions qui auraient pu faire basculer le match d’un côté comme de l’autre. Ce soir-là, le RC Lens s’était imposé 3 à 0, mais le score aurait pu être tout autre ; 4 à 2, 3 à 3, 5 à 0. Comme dimanche soir en fait. Le football total. La Ligue 1 n’est pas si mal finalement.
Franck Haise et son staff ont brillamment contré un OM différemment génial. Le pressing tout terrain a une nouvelle fois fait des ravages. Depuis la saison dernière, le RC Lens s’évertue à récupérer des ballons très hauts, et à les transformer en occasions franches, voire en buts. Le pénalty transformé par l’insubmersible Florian Sotoca est la conclusion d’une énième production collective de la fameuse « défense qui avance ». A la 10ème minute, Pau Lopez s’est senti bien seul dans son face à face avec Kalimuendo. Mais réduire le RC Lens a son pressing serait insultant. Le deuxième but est quant à lui la conclusion d’une action extrêmement bien préparée. Et le gros plan sur Frankowski et Sotoca dans les secondes précédant l’action le démontre bien. La conclusion est géniale, et semble être une habitude pour le Polonais, qui a déjà démontré qu’il savait être décisif en utilisant son pied opposé en rentrant vers l’intérieur, que ce soit à Lens ou au Jagiellonia Białystok.
Kiedyś w Gliwicach, wczoraj w Marsylii, ten sam Przemysław Frankowski 🚀
— PKO BP Ekstraklasa (@_Ekstraklasa_) September 27, 2021
CC: @rclens pic.twitter.com/Z8tyAmN3Yf
Fidèles
Bien évidemment que le RC Lens ne pouvait dominer les 90 minutes comme il l’a fait durant la première et la dernière demi-heure. Et bien évidemment qu’un Dimitri Payet inspiré peut être plus qu’un grain de sable dans une formidable mécanique. Le changement tactique effectué à la mi-temps par Sampaoli a failli être décisif. Franck Haise a répondu à l’équation de manière brillante. Au cœur de la tempête, dans un Vélodrome des grands soirs, les Sang et Or ont réussi à maintenir la barre. Le repli défensif s’est adapté, mais l’animation est restée la même, la sérénité n’ayant jamais quitté les joueurs sur le terrain, titulaires comme remplaçants. Et même quand Ünder touchait la barre et que Lirola tutoyait le poteau droit de Jean-Louis Leca. Fidèle à ses principes, le RC Lens a repris petit à petit la main pour éteindre définitivement son rival du soir, fruit d’une formidable attaque placée partie de Gradit, passée par Clauss et Sotoca, pour finir sur la tête du revenant Saïd. La fin de la rencontre fut maîtrisée, et les hommes de Seko donnaient même l’impression d’avoir envie d’en mettre un quatrième. Après la victoire dans le derby il y a huit jours, le RC Lens vient d’offrir une nouvelle soirée d’allégresse à son public.
Il est difficile de retenir toute enflammade depuis dimanche 23h. Mais il ne faut plus se cacher derrière son petit doigt. Ce RC Lens n’est plus l’ex-petit promu qui doit confirmer sa bonne première saison dans l’Élite. Cette équipe ne va certainement pas vivre cette “seconde saison plus difficile” que beaucoup lui prédisaient. Ce groupe a tout d’un trouble-fête qui peut répéter les performances, et faire en sorte que les exploits d’hier deviennent les performances de demain. Le RC Lens semble bel et bien s’être donné des ailes.
Tous fantastiques !
Écrit par Antoine