CULTURE SANG & OR

Roger Boury, Isbergues droit devant !

Roger Boury, joueur emblématique du football nordiste d’après-guerre, a porté les couleurs du RC Lens et du CO Roubaix-Tourcoing, où il s’est imposé comme un joueur fiable et polyvalent. S’il a surtout marqué l’histoire régionale, son parcours l’a tout de même mené jusqu’à l’équipe de France, qu’il a connue à une reprise, en 1952.

CORT 1952-1953
C.O Roubaix Tourcoing 1952-1953
Un Isberguois peut en cacher un autre

Roger Emmanuel Joseph Boury est né le 30 décembre 1925 à Isbergues, dans le Pas-de-Calais. Il est le fils d’Emmanuel Joseph Boury, menuisier, et de Marie-Louise Dupont. Il a un frère aîné, Claude Emmanuel Joseph Boury, né en 1924.

Il commence le football dans le club local de l’ES Aire-Isbergues, où il développe ses premières qualités de joueur. À Isbergues, Roger grandit rue de Molinghem, puis rue Arthur-Lamendin, à quelques centaines de mètres de chez Marcel Ourdouillier, futur joueur du RC Lens. C’est en 1945 qu’Ourdouillier, qui a une solide expérience à passé trente ans, repère le jeune Boury. Séduit par son talent, il l’emmène au RC Lens, lançant ainsi sa carrière professionnelle.

Les débuts professionnels à Lens
Roger Boury
Photo RCLens

Roger Boury rejoint le RC Lens en 1945, pour évoluer aux côtés de joueurs comme Gouillard, Siklo, Ourdouillier et Stanis. Après une saison chez les jeunes, il intègre l’effectif professionnel. Et malgré une première saison en première division réussie collectivement, avec une belle 6e place, Roger ne s’exprime pleinement qu’à l’entraînement : sur le terrain, il reste timide et discret.

La saison suivante est plus difficile : le RC Lens termine 17e et est relégué en deuxième division. Poussé vers la sortie, Boury troque en 1948 la tunique sang et or pour le paletot blanc cerclé de rouge et noir du CO Roubaix-Tourcoing, le champion de France 1947, sans que rien ne semble le prédestiner à une carrière internationale.

Roubaix : l’éclosion d’un joueur complet

Transféré au CORT pour la modique somme de 1 750 000 FF, Roger Boury se révèle rapidement comme un joueur polyvalent. Excellent des deux pieds, il est testé à plusieurs postes par Julien Darui, entraîneur et gardien de but : comme demi, avant-centre et ailier, avant d’être définitivement installé en tant qu’inter (un milieu offensif excentré, comme on l’appelerait de nos jours), où il exprime pleinement son potentiel.

Sous la direction de Julien Darui, il s’entraîne intensivement, ajoutant deux heures par jour consacrées au maniement du ballon, en plus des séances collectives. À vingt-six ans, il vainc sa timidité naturelle et devient l’un des plus sérieux espoirs du football français. Darui dira :

« C’est celui de mes joueurs qui, en un an, a le plus progressé. »

Julien Darui

Bien qu’élément clé du maintien du CORT dans l’élite, Roger Boury n’est pas immédiatement appelé chez les Bleus. En 1951, pour le stage de Rueil, il figure parmi les rares joueurs retenus pour la première fois. Après plusieurs matchs avec l’équipe B, il obtient le 20 avril 1952 sa seule sélection en équipe de France A, lors d’un amical à Colombes contre le Portugal, remporté 3-0.

Roger Boury
Roger Boury sous le maillot de l’équipe de France
Photo FFF

Après la saison 1951-1952, le CORT effectue une tournée en Espagne, s’imposant 3-1 contre l’Atlético de Madrid et disputant la finale du Trophée Teresa-Herrera contre Valence CF. La légende veut que Roger et son coéquipier Léon Letsch aient été sollicités par Santiago Bernabéu, président du Real Madrid, mais qu’ils aient choisi de revenir à Roubaix.

Boury traverse ensuite trois saisons difficiles, et le CORT est relégué en deuxième division en 1955. À la suite de cette descente, et alors que ce club perd de sa superbe, il est réclamé par ses anciens coéquipiers lensois. Il fait alors son grand retour au RC Lens.

Retour à Lens et fin de carrière

Lors de son second passage chez les Sang et Or, il connaît ses plus grands succès collectifs : le club termine vice-champion de France en 1956 et 1957 et atteint la demi-finale de la Coupe de France en 1958.

Sur le plan personnel, il se marie avec Raymonde Marguerite Claire Guilmain, originaire d’Hazebrouck, et ils ont six enfants : Jean-Jacques, Guy, Hugues, Bruno, Nathalie et Richard. L’un de ses fils, Hugues Boury, né en 1957 à Roubaix, devient lui aussi joueur de football. Il est formé à Saint-Étienne, où il se lie d’amitié avec Dominique Rocheteau, et rejoint à son tour le RC Lens alors qu’il vient d’être relégué en D2, en 1978, pour une seule saison.

En 1958, Roger retourne à Roubaix pour quelques matchs avant de prendre définitivement sa retraite sportive. Sous l’influence d’Albert Prouvost, patron de la Lainière de Roubaix, il devient négociant textile. Retiré à Marcq-en-Barœul, il décède le 4 décembre 2010 à Lille.

Roger Boury
Roger Boury à l’exposition « Cent ans
de football à Roubaix » en 2006
Photo c.o.r.t.free.fr

Roger Boury a marqué le football nordiste par sa constance, sa polyvalence et sa volonté de bien faire. À Roubaix, sous la tutelle de Julien Darui, il a trouvé un environnement propice à son épanouissement. Cette période symbolise l’éclosion d’un joueur complet et respecté, dont les progrès constants lui ont permis de revenir au RC Lens et de connaître ses plus beaux succès collectifs. Plus qu’un joueur de talent, Roger Boury restera dans les mémoires comme un équipier exemplaire, fidèle à ses clubs et à ses valeurs.

Sources :

  • fff.fr
  • Généanet
  • MatchId
  • Bibliothèque numérique de Roubaix
  • Archives départementales du Nord
  • Archives départementales du Pas-de-Calais
  • Les footballeurs roubaisiens d’élite : trajectoires professionnelles et intégration sociale des années 1930 à nos jours, Nicolas Penin
  • Combat, 10 octobre 1951
  • Ce soir, 31 janvier 1951
  • Le Soir, 13 octobre 1951
  • L’Écho du soir, 20 septembre 1951
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