CULTURE SANG & OR

 Recruter Robin Risser, c’est « faire du Lens  »

Robin Risser, 20 ans, est devenu vendredi le gardien du nouveau cycle lensois. Si nous l’avions déjà présenté peu après l’officialisation, nous avons estimé que le recrutement de ce joueur peu connu du grand public à un poste clé méritait une analyse approfondie. Grâce au travail de @guillaume_vague, découvrez quel joueur est Robin Risser.

Photo TouchedeBalle
Un gardien fort sur sa ligne

Guillaume Vague est scout, analyste vidéo et fondateur du collectif @Touchedeballe. Il suit assidument le RC Strasbourg Alsace depuis l’enfance et évolue lui-même au poste de gardien au niveau amateur depuis 25 ans. Son nom est donc immédiatement ressorti de la base de données de Culture Sang et Or lorsque l’arrivée de Robin Risser au RC Lens est devenue concrète. Réactif et capable d’apporter des éclairages tactiques pertinents, Guillaume est l’analyste le plus à même de présenter le joueur qu’est Robin Risser.

L’une des premières choses que nous avons demandées à Guillaume : est-ce que Robin Risser sait faire des arrêts ? Cela peut paraître simple, mais c’est une donnée capitale et aisément mesurable. Comme décrit sur le premier visuel fourni par Guillaume, Risser dispose de bons réflexes sur sa ligne, a une bonne envergure et une détente de qualité. Statistiquement, cela se retranscrit par un excellent pourcentage d’arrêts (75% de tirs arrêtés) et des buts évités (23 buts encaissés pour 28 buts attendus).

Le jeune Alsacien a grandi non loin de l’Allemagne et admire Manuel Neuer. Ce n’est donc pas surprenant de le voir employer la « technique de la croix » dans les cages. Elle est utilisée pour réduire l’angle de tir et bloquer le ballon dans les situations de face à face. Elle consiste à avancer vers le tireur, tout en ouvrant les bras. Dans le même temps, le gardien lance une jambe sur le côté tandis qu’il plie l’autre pour occuper un maximum d’espace dans le but, ce qui crée ainsi une croix, visuellement.

Photo @Touchedeballe
Racing Cohérence de Lens

Mais plus que la capacité de l’ancien portier du Red Star à faire des arrêts, ce transfert transpire la cohérence. L’Alsacien se démarque par sa façon de prendre ses responsabilités dans les relances de son équipe. Très tôt dans nos échanges, Guillaume parle de « pertinence dans le recrutement de Risser. L’an passé, le Red Star jouait en majorité à trois derrière. Lorsque l’adversaire presse les défenseurs centraux, Robin aime profiter du décrochage d’un milieu technique et bon sous pression pour trouver une solution de relance. »

L’analyste a bien évidemment en tête le fait que Lens évolue dans ce système depuis quatre ans sinon plus, et compte maintenir ce dispositif sous Pierre Sage. Mais il sait aussi que le nouveau coach lensois est un adepte des sorties de balles à 3 + 1, comme nous l’avions expliqué dans notre article qui présentait les principes grands principes de jeu de Pierre Sage.

Capture d’écran Beinsport par Touchedeballe

Longtemps réduit à des jugements rapides sur son jeu au pied, le portier formé à Strasbourg a pourtant démontré au Red Star une réelle capacité à être un acteur central de la phase de construction. Dans un système à trois défenseurs, il a assumé un rôle proactif, contribuant à créer des supériorités numériques dès la première ligne.

Photo Beinsport x Touchedeballe
à Lens pour prendre son pied ?

Guillaume a revisionné ses 71 arrêts et plusieurs morceaux de matchs de Robin Risser au Red Star. Mais il le suivait déjà lors de son prêt à Dijon… et à Strasbourg évidemment ! « J’ai commencé en U17, mais j’ai été beaucoup plus assidu en Gambardella et U19. Robin, ça doit faire quatre bonnes années que je le suis et que j’attends qu’il reprenne le flambeau au Racing… mais je pensais à celui de Strasbourg, pas de Lens. »

Capture d’écran Beinsport par Touchedeballe

Son avis sur le jeu au pied du néo-Lensois est limpide. « Une légende urbaine circule sur les réseaux pour dire que Risser a un mauvais jeu aux pieds. Chacun est libre de penser ce qu’il veut, mais enfin je ne connais aucun gardien qui est autant responsabilisé à la relance et proactif en étant mauvais aux pieds. Il n’est pas parfait bien sûr, mais c’est très correct (…) Les gens qui disent qu’il n’est pas bon au pied sont ceux qui ne regardent pas les matchs mais certains highlights, car il est vrai que sur certains buts/tirs concédés, il joue mal le coup : il rate un ballon aérien sur une passe en retrait, dégage en touche, intercepté par un adversaire dans le couloir… mais la proportion est à vue d’œil assez faible. »

Concernant le jeu au pied toujours, Guillaume souhaite toutefois nuancer le fait que le pressing en L2 n’était pas le même que celui qu’il s’apprête à subir en L1.

Capture d’écran Beinsport par Touchedeballe
Une marge de progression liée à l’expérience

On en arrive aux axes de progression. « Là où Risser peut encore s’améliorer, c’est dans la gestion des détails et la constance de ses interventions. Un exemple : sur un but encaissé, il tarde à s’avancer sur sa ligne des 6 mètres et se retrouve légèrement trop reculé, alors que le tir est écrasé et peu puissant. Ce genre d’action ne relève pas d’un problème technique, mais plutôt d’une accumulation de facteurs cognitifs à gérer (placement, replacement, lecture de trajectoire, appuis dynamiques…). Et cette gestion d’une multitude de paramètres ne peut se régler que par l’expérience. »

Photo Beinsport x Touchedeballe
Des erreurs visibles… mais marginales

Il est vrai que certains résumés montrent Risser en difficulté : un dégagement raté, une passe interceptée ou un ballon mal négocié dans les airs. Mais ces séquences sont loin de refléter la globalité de ses performances. La fréquence de ces erreurs reste relativement faible, et souvent, elles sont davantage dues à des choix de jeu risqués qu’à une faiblesse technique structurelle.

Plus le nombre de paramètres augmente, plus la marge d’erreur s’élargit. C’est là qu’intervient l’expérience, celle qui affine les automatismes et réduit les hésitations. Guillaume le suit depuis plus de quatre ans, il a donc constaté son évolution.

« Plus tu joues, plus tu progresses. Ça s’applique à tous les postes et encore plus à celui de gardien de but. Il a su s’imposer en L2 dans une équipe qui jouait sa survie. C’est quelque chose qui manquait dans sa formation puisqu’il a été surtout habitué à évoluer dans une équipe dominante, que ce soit Strasbourg en jeunes, ou en sélection. (…) Toutefois, de là à garantir qu’il soit au niveau d’un top 8 de L1, il reste des zones d’ombre. C’est un énorme pas en avant. Je pense surtout qu’il va falloir l’accompagner et accepter que c’est un jeune gardien, qu’il apprend encore. La maturité chez un gardien arrive vers 28-29 ans. De fait, il faudra accepter que parfois il coûte des buts, parfois il peut mieux faire. Mais soyez certains qu’il ne fera jamais semblant, qu’il sera le premier désolé et attristé s’il a une part de responsabilité dans des buts encaissés. C’était le cas à Dijon, face au Red Star, mais il n’abdique pas. Alors si je peux vous donner un conseil, ou demander une faveur, c’est de l’accompagner dans son développement. »

Photo @Touchedeballe
Un gardien recruté pour « faire du Lens »

Après avoir tutoyé les sommets, le RC Lens est revenu à une forme de réalité. Si celle-ci désole certains supporters, qui regrettent encore le Brice Samba de la grande époque, il est important de regarder où Lens se situe dans son cycle de performances. Les départs de piliers de la période dorée se sont accompagnés de doutes et de nombreuses erreurs. Mais Lens s’est maintenu top 8 et ne présente pas de sérieux problèmes financiers.

Depuis dix-huit mois, le supporter lensois semble pris dans d’interminables turbulences. Et la dernière secousse était probablement la plus forte. Depuis le mois de mai, on dénombre près de dix départs, certains à des postes clés… Cela donne le vertige. Mais aussi le sentiment que les dirigeants ont l’intention de rebâtir sur des fondations durables. Ainsi, Lens a recruté son entraîneur et constitué son staff. Mais aussi recruté d’abord au poste le plus prioritaire. Et c’est un joueur humble, jeune, avec une grande marge de progression qui a ouvert la marche.

Guillaume le décrit comme « un gamin sérieux, qui déteste perdre. Il va pourrir ses coéquipiers à chaque occasion concédée, mais c’est quelqu’un de simple et qui s’est largement adapté aux vestiaires strasbourgeois, dijonnais, audonien (dans un effectif déjà constitué à son arrivée au Red Star), et en sélection. Il semble avoir laissé bonne image partout. Que ce soit dans le vestiaire ou auprès des fans. De plus, je n’ai aucun doute sur son leadership. »

C’est l’ensemble de ces éléments qui nous poussent à reprendre une phrase régulièrement employée lors d’une récente période dorée. Recruter Robin Risser, c’est « faire du Lens ».

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