Le titre est un peu aguicheur, mea culpa. Cet édito ne porte en rien sur d’hypothétiques guerres intestines qui pourraient avoir lieu à la Gaillette. Ou même d’embrouilles au sein du groupe Culture Sang et Or, qui vit toujours aussi bien. Ici, on aborde prosaïquement les conflits qui hantent nos cerveaux, et peut-être celui des joueurs, alors que RC Lens affiche le meilleur bilan de son histoire après 15 journées de championnat. Faisons un petit rappel de SVT ; dans notre cerveau, l’hémisphère gauche concentre l’ensemble des activités mathématique et logique de notre organisme, quand son collègue de droite porte plus sur l’imaginaire et la créativité. L’explication biologique du débat entre le rationnel et l’irrationnel, entre le concret et l’abstrait, entre le besoin de rêver et l’envie de rester pragmatique, ou inversement. Car c’est bien de cela qu’il s’agit dans ce Comme Un Lundi ; la lutte féroce entre plusieurs sentiments contradictoires qui sévit silencieusement dans cette zone de matière grise appelée nuance.
Le RC Lens, au tiers de la saison, se voit propulser sur le devant de la scène, mis en lumière comme rarement depuis une vingtaine d’années. On se souvient tous de la Une de France Football du 14 février 2006. Le statut de l’équipe mais aussi celui du club ont changé, aussi bien au sein de la communauté Sang et Or qu’auprès des médias nationaux aussi difficiles à convaincre que prompts à céder à la culture de l’instant. Garder la tête froide alors que le corps est brûlant. La victoire est un venin addictif. Il brouille la vue et rapproche irrémédiablement de la chute. Les succès qui s’enchaînent, et cette deuxième place, agissent comme une forme d’état orgasmique constant de basse intensité. Chaque weekend depuis cet été, une piqûre d’adrénaline est venue prolonger cet état de plénitude que tout supporter de football rêve de vivre. D’ailleurs, le RC Lens n’est-il pas l’un, si ce n’est le club de football français le plus envié à l’heure où l’on se parle ? Une grande partie des supporters lensois et surtout le vestiaire se prend à rêver ouvertement d’un retour en Europe, et on parle de plus en plus de la plus prestigieuse des compétitions. Et pourtant, les joueurs devront résister autant que possible aux pensées perturbantes et tout à fait naturelles que l’on appellera déconcentration.
Lutter contre le calcul
Le début de saison exceptionnel n’enlève pas le fait que le chemin vers la gloire est encore long. Très long. Factuellement, le RC Lens n’est même pas encore à la moitié du gué. Alors qu’on entame la troisième semaine de préparation, se profilent à l’horizon un déplacement à Nice ainsi que la réception du club le plus puissant de l’histoire du football français. Les artésiens retrouveront ensuite la Coupe de France (Linas-Montlhéry), autre rêve qui pourrait s’inviter à la lutte, avant de rendre visite à l’autre Racing du football français, mal en point et d’autant plus dangereux. Affirmer qu’il s’agit d’un tournant semble être galvaudé, tant les ambitions avouées à demi-mot ne seront satisfaites que par une régularité de tous les instants. Mais il s’agira tout de même d’une ascension de col de type hors-catégorie. Pour poursuivre la quête du rêve, les hommes de Franck Haise devront être à 120% à Nice, contre le PSG et lors de chacune des rencontres suivantes. Et “oublier” ce qu’ils ont intériorisé pendant ces 8 semaines de trêve, à savoir la place de dauphin, ainsi que la confortable avance sur leur premier poursuivant. Au risque de commencer à calculer.