CULTURE SANG & OR

Pierre Blarel, Le Bourbotte Lensois

Pierre Blarel est l’un des jeunes joueurs qui ont marqué le renouveau du RC Lens au début des années 50. Inter gauche de talent, surnommé par la presse le Bourbotte lensois, il a évolué au cœur d’une génération prometteuse aux côtés de Jean Lewandowski, Eugène Grévin et François Ludo. Retour sur le parcours d’un enfant du bassin minier devenu une figure incontournable du football lensois de l’époque.

Pierre Blarel
RC Lens saison 1950-1951

Des débuts prometteurs

Pierre Blarel
Pierre Blarel

Issu d’une famille modeste installée à Avion, rue Jules-Pierron, Pierre François Richard Blarel, né en 1928, grandit entouré de son frère Jean et de sa sœur Jeanne. Très tôt, sa passion pour le football l’amène sur les terrains. Après avoir déménagé avec ses parents à Lens, rue Freycinet, à la fin des années 1930, il intègre naturellement la jeune garde lensoise de cet après-guerre sous la houlette d’un certain Ladislas Smid, dit Siklo. Avec son grand gabarit et son talent indéniable, Blarel se fait rapidement une place parmi les jeunes espoirs du club, aux côtés de son camarade Jean Lewandowski. À 22 ans, il passe professionnel et devient un élément clé du dispositif lensois durant les saisons 1950-1952.

Le long Pierre Blarel, à la chevelure blonde comme les blés, à peine sorti de la nursery du stade Bollaert, s’affirme de dimanche en dimanche. Par son style et sa présence sur le terrain, il rappelle le milieu international François Bourbotte, et nombreux sont ceux qui lui prédisent un avenir sportif similaire. Dans une équipe dépourvue de grandes vedettes, les jeunes joueurs prennent leurs responsabilités et s’imposent peu à peu comme les piliers du renouveau du RC Lens.

« Il nous a fallu rajeunir profondément une formation composée en majeure partie de vedettes sur le déclin. Sans gros moyens financiers, nous n’avions qu’un unique moyen : faire appel à des jeunes. »

Le président Louis Brossard

L’heure de Jean Lewandowski, Pierre Blarel et François Ludo venait de sonner, tandis que celle de Fernand Sauty, Eugène Grévin et Roland Wattecamps n’allait pas tarder. Blarel bénéficie également de l’arrivée d’un nouvel entraîneur, Ludwig Dupal. À cette époque, Lens connaît une véritable révolution stylistique. Nostalgique du beau jeu qu’il pratiquait en tant que joueur avec le FC Sochaux avant-guerre, Ludwig Dupal impose un style technique et offensif, rompant totalement avec l’approche physique de son prédécesseur Nicolas Hibst. Ce changement de philosophie permet à de jeunes joueurs de s’épanouir pleinement et de briller sous les couleurs sang et or.

Un Lepagnot peut en cacher un autre

Le père de Pierre, Richard Achille Blarel, ébéniste menuisier puis marchand de lait, né le 3 mars 1891 à Lillers, épouse en 1923 Alisane Lepagnot, un nom de famille bien connu des supporters du Racing Club de Lens. L’ancien dirigeant Max Lepagnot, originaire d’Avion lui aussi, dont le nom a été attribué à une tribune du stade Bollaert-Delelis, fait-il partie de la famille que rejoint Pierre Blarel ? Eh bien, oui, Alisane et Max partagent un ancêtre commun : un certain Michel Romain Lepagnot, né vers 1736 près d’Avion.

Une saison remarquée à Perpignan

Après deux saisons passées au RC Lens, où il a contribué à maintenir le club en élite malgré des moyens limités, Pierre Blarel voit son temps de jeu diminuer au cours de sa seconde saison. Il est alors prêté à Perpignan, qui, venant d’être promu en tant que club professionnel, se lance à la recherche de joueurs à travers toute la France pour constituer une équipe compétitive. Aux côtés de joueurs emblématiques comme José Fontanet, Marcel Lupi, Roger Thomas et les frères Petitfils, Blarel s’illustre et joue un rôle clé dans l’excellente première saison des Catalans. Sa performance étant appréciée, Perpignan envisage de le conserver, mais le RC Lens décide finalement de le récupérer.

Pierre Blarel
Le Lensois Pierre Blarel (au fond) se précipite pour aider son gardien Angelo Contini
But et Club, 26 décembre 1950

L’épopée monégasque

« La saison dernière nous a permis d’apprécier dans notre équipe un progrès très sensible de la qualité du jeu. Mais nous avons aussi noté un manque d’efficacité auquel nous nous sommes efforcés de remédier. Nous avons donc conservé la plupart de nos éléments et nous n’avons cédé que Ludo et Blarel à Monaco. »

Vital Lerat dans L’Équipe, 5 août 1953

En 1953, Pierre Blarel quitte définitivement le RC Lens pour rejoindre l’AS Monaco. Ce transfert s’inscrit dans une ambitieuse campagne de recrutement du club monégasque, qui se prépare à faire ses débuts en première division. Il retrouve ainsi son ancien coéquipier François Ludo et l’entraîneur qui lui avait donné sa première chance, Ludwig Dupal, également attiré par la Principauté. Durant ce mercato, l’AS Monaco ne lésine pas sur les moyens et dépense pas moins de 45 millions de francs pour renforcer son équipe :

  • Antoine Pons (Sète), 3 millions
  • Lazare Gianessi (Roubaix), 17 millions
  • Pierre Blarel et François Ludo (Lens), 7 millions
  • Henri Skiba (Besançon), 5 millions
  • Jean Saunier et Marius Walter (Le Havre), 12,5 millions

Cependant, le passage de Pierre sur le Rocher est rapidement marqué par une grave blessure. Lors d’un match contre l’AS Saint-Étienne fin août, il subit une violente collision avec Raymond Menjou, ce qui entraîne une fissure du crâne et l’éloigne des terrains pendant plus de six mois. Il profite de cette période de convalescence pour retourner dans le Nord et épouser Marie-Jeanne Van Braband le 19 novembre 1953. Cette blessure freine sa progression, et sa deuxième saison à Monaco sera plus discrète.

La reconversion

Pierre Blarel
Pierre Blarel
Sang et Or magazine

Après son départ de Monaco, Pierre Blarel rejoint le CORT (Club Olympique Roubaix-Tourcoing) en deuxième division, avant de terminer sa carrière en tant qu’entraîneur-joueur à Mers-le-Tréport, en Division Honneur, où il remporte la Coupe de Picardie. En 1961, il quitte définitivement le football et, avec sa famille, reprend une entreprise de transport à Lens.

Retraité en 1988, Pierre Blarel se retire à Saint-Amand, un petit village près de Pas-en-Artois, où il vit paisiblement avec son épouse. Il décède le 15 juillet 2015, à l’âge de 81 ans, laissant derrière lui une carrière remarquable et un profond attachement au RC Lens.

Sources :

  • Sang et Or magazine, n° 37, mars 1998
  • Ce Soir, 18 octobre 1950
  • L’Équipe, 2 septembre 1953
  • Plaquette souvenir du cinquantenaire du Racing Club de Lens
  • Archives du Pas-de-Calais
  • Geneanet
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