Entre l’OM et le RCL, deux trajectoires diamétralement opposées comme les points cardinaux du nord et du sud. Mais s’il y a bien un dénominateur commun, c’est la passion qui entoure ces deux clubs. Dans cette rencontre retour au Vélodrome, Rayane du Football Club de Marseille raconte quelques clés du match pour faire monter un peu la température.

Photo CSO
CSO : Est-ce que tu peux déjà te présenter, un peu ton « profil » supporter, ainsi que ton rôle et une présentation de FC Marseille?
Rayane : Je suis Rayane Benmokrane, journaliste pour le média Football Club de Marseille depuis 2019. Je suis un peu le couteau suisse du média. Je fais des interviews de supporters après les matchs, du montage, je suis aussi réalisateur des émissions, je fais des streams sur notre chaîne Twitch, j’anime certains debriefs et je vais aussi en reportage et conférence de presse quand il le faut. Mon profil de supporter est celui d’un jeune Marseillais classique. J’ai grandi dans les quartiers Nord, je suis Algérien d’origine, je me suis donc très vite identifié à Samir Nasri au début des années 2000 et je suis tombé amoureux de ce club. L’OM et le foot ont toujours fait partie de ma vie mais je n’imaginais pas, même en étant en école de journalisme, que ce serait un jour mon travail au quotidien ! Bien sûr maintenant le côté supporter a été mis de côté et j’essaie de faire mon travail le plus honnêtement possible sans laisser la passion prendre le dessus.
Comment s’organise l’OM sauce De Zerbi ? Quelles en sont ses forces et ses faiblesses ? Comment tu perçois à l’inverse cette équipe de Lens, ta vision sur son organisation tactique et ses joueurs clés ?
On avait le sentiment qu’il allait falloir laisser beaucoup de temps à Roberto De Zerbi avant de pouvoir tirer des enseignements. À Marseille, on a souvent tendance à être très impatient et à vouloir des résultats immédiats. Il a fallu apprendre à connaître ses principes tactiques avant de juger son travail. Au final, on se retrouve avec un coach qui a su s’adapter à son effectif et à la Ligue 1… qui a aussi conscience qu’il faut travailler avec le board pour que tout le monde aille dans le même sens. C’est vraiment le sentiment qui prédomine à Marseille cette saison. La force de l’OM est dans son milieu de terrain, que beaucoup de clubs nous envient. Tactiquement, ce n’est pas encore au point à 100% parce que les latéraux ne font pas vraiment ce qu’attend le coach. La possession est parfois stérile même si le tout est bien huilé… Il ne faut qu’un jour où techniquement les Marseillais sont un peu en dessous pour tout enrailler. C’est l’une des principales inquiétudes.
Pour le RC Lens, j’ai grandement apprécié le travail de Franck Haise et l’effectif qu’il a réussi à construire à travers ses premières années en Ligue 1. Malheureusement pour Will Still, c’est plus compliqué pour lui avec les départs de cet hiver. L’ADN tactique de Lens ça reste l’assise défensive et la projection vers l’avant avec des pistons de grande qualité. Entre les blessures, les suspensions, les départs de joueurs clés… on ne reconnaît plus vraiment le RC Lens qui venait embêter les équipes du haut de tableau. Il reste quand même des joueurs de qualité dans cette équipe comme Medina, Diouf au milieu de terrain qui dans un grand soir peut vraiment être dangereux.
Lens enchaîne les déconvenues, quatre défaites d’affilée. L’équipe ne joue plus très bien avec un moral post-mercato en berne. L’OM est dans les clous niveau objectif avec une belle deuxième place. Quelle est la tendance actuelle côté phocéen ?
Pour l’OM, ça reste une belle affiche de jouer face au RC Lens dans un Vélodrome qui sera une nouvelle fois plein… Il n’y a qu’un réel absent en la personne d’Amir Murillo qui joue central droit dans la défense à trois. Lirola ou Rongier pourraient le remplacer, ou Luiz Felipe qui a fait sa première apparition contre le FC Nantes. Sinon, l’OM devrait être dans ses standards habituels et prétend logiquement à gagner ce match. Mais on n’oublie pas les déconvenues récentes, notamment celle face à l’AJ Auxerre qui a fait beaucoup de mal tant aux joueurs qu’aux dirigeants. Contre le FC Nantes, la première mi-temps n’était pas brillante, on s’est fait peur à plusieurs moments. Même si tout le monde nous voit favoris, il y a une partie de moi qui a peur de ces matchs-là parce que même avec cette belle deuxième place, on a trop souffert ces dernières années… et je pense que la plaie n’est pas refermée. La tranquillité, ça ne fait pas partie du supportérisme marseillais !
Au match aller à Bollaert, le scénario était un peu fou. Lens égalise à 2 à 2 mais en fait non, la VAR intervient à la récupération de balle à 90 mètres et 20 secondes pour une faute lensoise. Le coup franc à 20 mètres du but de Brice Samba (à l’époque) est sifflé, tiré et marqué par Højbjerg. Allez, fais-nous du mal, tu peux nous raconter ton souvenir de ce match ? Qu’est-ce qui a changé un peu dans le jeu de l’OM depuis ?
Avec les récents déboires avec l’arbitrage, ce scénario paraît presque irréel ! Mais finalement, ça a tourné en la faveur de l’OM qui a su prendre les trois points dans un match qui n’était pas aussi simple que le score peut laisser penser. En première mi-temps, l’OM a beaucoup subi et a raté de grosses occasions. On se rappelle notamment de cette frappe de Maupay qui termine dans le petit filet. Finalement, c’est lui qui offre une belle passe à Rongier, qui marque après une longue blessure. À la 80e, le but de Fulgini fait vraiment chier, pardonnez-moi l’expression. C’est un cafouillage, des arrêts, des contres… et finalement ça va au fond. Quand le but de l’égalisation est marqué, il y a presque un fatalisme qui nous fait dire : on le savait… C’est toujours pareil. Puis finalement, non ! La VAR annule le but et il y a ce coup-franc transformé par Højbjerg dans un geste puissant et précis. C’était extrêmement savoureux. Gagner à Lens, c’est quelque chose mais avec cette manière ça l’est encore plus !
Depuis ce match, l’OM a changé quelques petites choses. Déjà, il y a deux recrues qui ont intégré le onze : Gouiri et Bennacer. C’était juste du calibrage avec des profils de joueurs qui manquaient au coach De Zerbi. Les deux sont très en forme même si le milieu de terrain a été moins en vue lors de la rencontre face à Nantes dimanche dernier. Je dirais que l’OM est plus fort qu’en novembre et a des chances de faire mal à ce RC Lens en manque de confiance et affaibli par ses absents.
Le mercato d’hiver n’a pas été de tout repos et représente en tout cas à Lens un tournant fort dans cette saison avec le départ de quatre joueurs clés en défense. Quels ont été les mouvements à l’OM ? Qu’en penses-tu avec un peu de recul aujourd’hui ? Et un petit mot sur Elye Wahi que l’on ne connaît que trop bien au Racing ?
À Marseille, on a l’impression que ce mercato d’hiver a été synonyme de nettoyage de printemps. Les flops de l’été dernier (Wahi, Brassier, Koné), on a été remplacés par des joueurs qui apportent déjà au quotidien du club comme Gouiri, Bennacer et Dedic. Luiz Felipe est également venu renforcer les rangs en défense mais ses blessures et son manque de rythme l’ont empêché d’enchaîner. Il a fait une entrée contre Nantes mais c’est trop peu pour voir vraiment de quoi il est capable. En interne, on nous confie que c’est un joueur expérimenté, sérieux, qui apportera un vrai plus en fin de saison et certainement pour l’an prochain. Je pense que c’est l’un des meilleurs mercatos hivernaux que l’OM ait pu faire depuis un bon nombre d’années. Je ne dis pas seulement ça parce que deux Algériens sont arrivés et que ça me fait plaisir personnellement, mais ils ont vraiment apporté quelque chose, sont entrés dans l’effectif comme s’ils y jouaient depuis le début de la saison et dans le vestiaire, ça colle aussi.
Sur Elye Wahi, c’était certainement une erreur de casting. Je pense que le board marseillais pensait réellement pouvoir le relancer mais on s’est vite rendu compte que ça n’allait pas matcher avec De Zerbi. Il ne participait pas assez au jeu, son placement était hasardeux et devant le but, il a eu beaucoup de déchet. On le sait, Wahi, c’est un joueur qui fonctionne beaucoup à la confiance… mais il doit travailler tactiquement pour prétendre à la carrière que son potentiel promet. Il a du talent mais il doit s’exprimer dans une équipe qui joue en contre, qui a tendance à se projeter vers l’avant pour qu’il puisse montrer ses qualités de vitesse, de percussion. À Marseille, le numéro 9 n’est pas utilisé comme ça. Quand on voit que Maupay, qui a été recruté après la blessure de Moumbagna, a pris sa place en quelques matchs et a tenu la baraque jusqu’au mercato d’hiver, on peut se poser des questions sur l’intérêt d’avoir pris Wahi. L’OM a bien géré sa sortie, avec peu de pertes, et une recrue qui apporte immédiatement. Je souhaite vraiment le meilleur à Wahi qui en plus avait gentiment répondu à ma question sur sa phrase disant qu’il ne porterait jamais ce maillot… Finalement il ne l’a pas porté longtemps.
Un petit prono pour le match de ce samedi soir ?
Je dirais un 3-1 comme au match aller. Garder les cages inviolées, c’est très compliqué pour l’OM… On est encore dans l’inconnu avec la blessure de Murillo. Je vois bien un scénario serré jusqu’à la mi-temps, et une seconde période plus prolifique pour les Marseillais qui auront su gérer leurs temps faibles. À l’aller, on parlait d’un match qui sera sauvé par les gardiens. Là j’ai plus l’impression qu’on sera à la merci des attaquants marseillais pour voir un peu de spectacle. Attention quand même à ne pas « réveiller les morts », ce qui est l’une des spécialités de l’OM ces dernières années. Mais cette saison ne ressemble à aucune autre !
Merci à Rayane, du Football CLub de Marseille, pour ce riche entretien. Allez Lens !
