La trajectoire de Marian Calinski, né le 1er décembre 1911 à Linden en Allemagne, est le récit d’une vie et d’une carrière façonnées par les tumultes de l’Histoire. Si elles se finissent sur les bords de la Garonne, ce Franco-Polonais a d’abord brillé dans le bassin minier du Pas-de-Calais.
Les parents de Marian, Antoine Calinski, houilleur, et Cecilia Zawadka ont quitté leur Pologne natale pour travailler dans le Nord de l’Allemagne, avant de poser leurs valises en France, à Hersin-Coupigny, rue Bouffon. Le jeune Marian y a grandi avec ses deux frères et sa sœur, Stanislas, Léon, et Wanda.
Apprenti garçon boucher, Marian Calinski débute sa carrière de footballeur comme défenseur dans le club de la petite ville d’Hersin-Coupigny, avant de rejoindre le club de la ville voisine, le RC Sains-en-Gohelle. En 1932, la vie de Marian Calinski bascule avec le décès de son père, Antoine Calinski, puis celui de sa mère, Cecilia, deux ans plus tard.
Il est naturalisé en 1934. Et sa destinée prend un tournant lorsqu’il est repéré par le Racing club de Lens alors qu’il effectue son service militaire à Arras en 1935. Au sein de ce club qui a choisi résolument le professionnalisme, la majorité du recrutement et des transferts s’effectue au sein des clubs pairs : un seul joueur amateur, Marian Calinski, est enrôlé pour la saison 1935-36. C’est là que débute l’ascension de Calinski dans le monde du football de haut niveau. Il signe son premier contrat à l’âge de 24 ans, aux côtés d’un certain Viktor Spechtl, international autrichien qui va s’avérer être un véritable compagnon de route.
Devenu charcutier à la coopérative, celui que l’on surnomme « beefsteak » effectue deux saisons pleines en D2, avant de réussir l’exploit de propulser le RC Lens en D1 pour la première fois de son histoire. Lors de sa première saison dans l’élite, le RC Lens arrive à se sauver in extremis. Au terme de la suivante, en 1938-39, les Lensois finissent à une très belle septième place.
Le 10 juillet 1939, quelques mois avant le début de la Seconde Guerre mondiale, Marian Calinski se marie avec Andréa Adélia Screve à Lens. La guerre, déclarée après l’invasion de la Pologne par l’Allemagne nazie, bouleverse sa carrière de footballeur. Capitaine du 3e Génie, il est capturé est fait prisonnier. Dans le camp d’Auvours au Mans, il côtoie son ancien coéquipier sang et or, Edmond Novicki. Sa détermination le pousse à s’échapper, et il trouve refuge à Cazères, une petite ville de Haute-Garonne, en zone libre.
Il travaille alors pour M. Aymard, président du club de l’US Cazères. Pendant les années noires de la guerre, Marian Calinski met ses compétences de boucher au service du restaurant « La Cantine », qui permet à la population de contourner les restrictions alimentaires. C’est ainsi qu’il intègre l’équipe locale de football, marquant le début d’une période glorieuse pour le club.
Un an plus tard, il contacte son ancien coéquipier et ami de toujours, le serial buteur lensois Viktor Spechtl. Les deux anciens du RC Lens sont maintenant les piliers de l’US Cazères. Et le club devient une force incontestable du football du Midi, qui verra passer des joueurs de renom tels que Jean-Claude Blanchard, Marc Ferratge, Jacques Massip, Jo Bravo (le père de Daniel), les frères Lanfranchi, Gérard Rey, ou encore Camille Gros.
Viktor Spechtl rejoint brièvement le club voisin de Rieux avant de revenir à Cazères. Son attachement à la ville et sa popularité parmi les Cazériens le conduisent à y terminer ses jours. Marian, divorcé en 1943, se remarie avec une fille du cru, Marie Rose Delluc, le 27 février 1946. Il reprend les rênes d’un bar appartenant a sa belle-famille, qu’il rebaptise Le Marian, et laisse ainsi une empreinte indélébile sur la ville de Cazères. Après plusieurs changements de propriétaires, le bar a gardé ce nom, et les Cazériens d’origine disent toujours « chez Calinski ».
En 1949, la vie de Marian est assombrie par la perte de son frère dans un tragique accident. Léon, mineur à la fosse 4 à Hersin-Coupigny, fait une chute de 60 mètres après qu’un plancher se soit effondré sous ses pieds. Il laisse derrière lui sa femme Hélène Sikora ainsi que deux enfants âgés de 14 et 5 ans.
Jusqu’à la fin de sa carrière de footballeur, Marian Calinski restera fidèle à l’USC. Puis il prendra le rôle d’entraîneur. Après avoir coaché l’US Martres-Tolosane pendant trois saisons, il revient à Cazères pour encadrer les jeunes. Sur les terrains de la Ligue du Midi, il laisse le souvenir d’un défenseur efficace, redouté pour son engagement, mais respecté pour sa sportivité. Il est décédé à Cazères le 18 mars 1988.
Sources :
- Les Aînés de l’US Cazères
- Généaland
- Généanet
- La Croix du Nord, 9 octobre 1949
- Le Grand Écho du Nord de la France, 2 septembre 1940
- Journal officiel de la République française, 25 février 1934