CULTURE SANG & OR

Lens-Strasbourg : place aux jeunes !

Un RC Lens en pleine cure de rajeunissement accueille Strasbourg, l’équipe la plus jeune de Ligue 1. Qui de mieux que Guillaume Vague, scout, fondateur du collectif @Touchedeballe et suiveur du RCSA, pour nous aider à présenter les prospects des deux Racing ?

Jeremy Agbonifo, jeune espoir
Photo CSO
  • CSO : Guillaume, tu es suiveur du RCSA mais aussi scout, analyste vidéo et fondateur de Touchedeballe. Peux-tu nous en dire plus sur ces activités ?

Guillaume Vague : Petit cumul de mandats en plus de mes autres activités professionnelles, oui. Pas le temps de m’ennuyer je dois dire. Mais sans avoir le sentiment de « travailler » pour autant puisque tout tourne autour du foot. Si un jour on m’avait dit que je serais payé pour regarder des matchs et les analyser… Je suis un privilégié. J’ai aussi eu envie de profiter de mes compétences pour créer une entité car j’accorde beaucoup d’importance à la cohésion et au travail d’équipe. J’essaie de les tirer vers le haut, et moi-même y compris. Apprendre au quotidien. Comme disait Platon, la seule chose que je sais c’est que je ne sais rien. Je me l’applique tous les jours.

  • Quel est le joueur strasbourgeois que tu préfères ?

D’un point de vue footballistique, Sebastian Nanasi régale. Il faut prendre en compte que sa saison a commencé en février-mars. Il y a quand même beaucoup de qualités intrinsèques dans cet effectif, même si les produits ne sont pas finis pour 90% d’entre eux. Et l’effectif a aussi été construit sur une logique de valeurs humaines. Un groupe de potes aux mêmes codes de par leur génération rapprochée.

Emanuel Emegha qui a un profil extrêmement recherché aussi. Grand, longiligne, très rapide. Il doit travailler sa maladresse mais on ne peut pas lui reprocher sa générosité et son savoir-vivre au sein d’un collectif, malgré quelques chambrages sur lesquels chacun se fera son avis. Sebastian Nanasi a tout pour être le nouveau chouchou, comme Diego Moreira. Des joueurs qui sont prêts à saigner sur le terrain, c’est ce que le public aime. Habib Diarra a le brassard, c’est un produit de la formation, c’est aussi un symbole fort.

  • Lors de l’aller à la Meinau, Lens avait globalement dominé les débats mais les deux équipes avaient partagé les points. Beaucoup de choses ont changé depuis au RCL. Qu’en est-il à Strasbourg ?

Difficile d’avoir une lecture limpide de la situation. Strasbourg tourne bien mieux depuis le début d’année, et plus globalement le retour de blessure d’Emegha. Lens est en pleine restructuration sportive, une sorte de fin de cycle. Et c’est peu commode de changer de cycle en pleine saison, il faut l’avouer. Maintenant, le club a aussi montré qu’il savait travailler à tous les étages, surtout avec les contraintes économiques récentes et qui sont parties pour durer. Il y avait un équilibre à trouver. Je penser que rentrer 100 millions d’euros dans les caisses était plus important, point de vue trésorerie, qu’une qualification européenne autre que la Ligue des Champions qui n’aurait pas rapporté autant. La qualif reste quand même possible, attention ! Mais les gains n’ont rien à voir avec la C1, qui n’est plus vraiment à portée des Lensois.

À Strasbourg, l’effectif a été dégraissé mais les cadres sont restés. Un onze a été installé, même si le banc reste très léger malgré les investissements. L’équipe a progressé. Il reste un flou autour des réelles ambitions sportives et de leurs enjeux par contre… On peut regretter d’avoir balancé la Coupe de France alors qu’il y avait un vrai parcours à vivre. C’est un peu un ventre mou qui se profile pour le club, là. Hors de danger pour le maintien, un peu décroché pour l’Europe, à moins de parfaitement négocier les deux prochaines journées (Lens et Brest). À l’issue de ces deux matchs, à mon avis, soit Strasbourg est encore en course en prenant par exemple quatre points, soit la saison est terminée dans le plus grand des calmes.

  • Lorsque l’on parle des forces et des faiblesses de cette équipe strasbourgeoise, qu’est-ce qui te vient à l’esprit ?

Comme depuis le début de la saison : les largesses défensives sont un gros problème. L’équipe encaisse beaucoup, et offre régulièrement des cadeaux. Ce n’est pas banal de devoir mettre trois buts pour gagner un match. Quand l’attaque sourit moins, c’est forcément plus compliqué et ça s’est vu à Rennes et contre Angers en Coupe. Cette jeunesse est à la fois une force, et une faiblesse. Tu combines la fougue, l’insouciance, avec de l’inexpérience, de la naïveté.

Et au niveau des points forts, c’est simplement la dynamique j’ai envie de dire. Offensivement, Strasbourg sait se créer des occasions, du danger, pour ce qui est du réalisme on sait jamais à quoi s’attendre dans le foot. Certains joueurs marchent sur l’eau en ce moment et surtout cette saison. Habib Diarra est dans la meilleure forme de sa vie, Andrey Santos est un joueur clé du collectif. Đorđe Petrović sort ses deux trois parades décisives par match… Diego Moreira c’est un peu ce hamster qui court à l’infini dans sa roue. Inépuisable. Il y a une forme d’Emegha-dépendance, surtout à la finition, mais dans le jeu, le danger peut venir de partout.

Photo RC Strasbourg Alsace
  • Selon toi, quelle place peut viser Strasbourg cette année ?

Je pense que Strasbourg est à sa place. Entre 7 et 9. Je ne sais pas si la saison sera jugée « réussie » sans Europe à la clé, mais par rapport aux périodes de creux, aux manques de l’effectif, à sa jeunesse, au nouveau projet incarné par Liam Rosenior… ce serait pas si mal. Et mine de rien un des meilleurs classements au XXIe siècle.

  • À ton avis, qu’est-ce qui peut faire basculer le match dimanche ?

Le réalisme, d’un côté comme de l’autre. Sur le papier, si on met de côté le contexte de Bollaert, j’ai le sentiment que Lens part avec un désavantage. Beaucoup de blessés, des départs à digérer, encore cette semaine… Maintenant évidemment le fait de jouer à domicile rebat les cartes, alors que Strasbourg a bien du mal à l’extérieur. Le réalisme étant un point d’interrogation à Strasbourg, je pense que c’est la clé, y compris pour Lens qui aura des grosses occasions aussi. Je m’attends à un match ouvert.

  • Touchedeballe a réalisé une belle analyse de Juma Bah, l’une des recrues de la direction lensoise. Penses-tu qu’il soit déjà capable de devenir le leader de la défense sang et or ? Vois-tu un autre joueur parmi nos recrues capables d’apporter une plus-value immédiate ?

Guillaume Vague : Touche de balle a effectivement présenté Juma Bah après l’annonce de sa signature. Ce n’est pas moi qui l’ai fait, bien que j’ai évidemment pris connaissance de la vidéo et du rapport. Mais pour être plus exhaustif, je vous renvoie à Adrien Lecardonnel, (@Ad_22_ri), qui a écrit le rapport et fait la vidéo.

Adrien Lecardonnel : Pour moi le leader de la défense reste Facundo Medina de par son vécu au club, sa fougue et son énergie. Mais Juma Bah a toutes les qualités pour s’imposer comme titulaire : la grande maturité et le calme qu’il démontre dans son jeu peuvent faire de lui un taulier malgré ses 18 ans, à l’image de l’aura que pouvait dégager Abdukodir Khusanov. Dommage que ça ne soit qu’un prêt de six mois, j’aurais bien aimé le voir prêté 18 mois (même s’il n’est pas à exclure que le prêt soit prolongé la saison prochaine), pour qu’il nous montre le maximum de sa palette.

Tactiquement c’est important de souligner qu’il n’a joué que dans une défense à quatre avec Valladolid. Peut-être que l’adaptation à la défense à trois lui nécessitera quelques semaines et que Will Still, avec son effectif changeant et la fin de mercato agité, préférera utiliser des joueurs déjà prêts tactiquement, comme Malang Sarr et Jonathan Gradit. Mais il a toutes les aptitudes nécessaire avec une vitesse de course plus que correcte pour un joueur de 1,95 m, et donc capable de couvrir ses partenaire de l’axe. Il a une bonne qualité de relance et surtout il est capable de casser des lignes. Enfin, il est très fort dans les duels en un contre un lorsqu’il a un 9 au marquage.

  • Si tu devais signer un des joueurs (restants) de l’effectif actuel du RCL pour renforcer Strasbourg, qui choisirais-tu ?

Guillaume Vague : Vous avez qui en jeunes joueurs nés à partir de 2006 ? Kylian Antonio, pourquoi pas ? Blague à part, c’est une bonne question. J’ai toujours bien aimé Andy Diouf. Je suis content qu’il retrouve son niveau avec Will Still. Ou Neil El Aynaoui que j’avais connu à Nancy. Sacré profil aussi. Sinon, ce n’est pas pour répondre à la question, mais j’ai hâte de voir l’évolution de Goduine Koyalipou, que j’aimais déjà à Niort à l’époque, et qui était même pisté il y a quelques saisons par Strasbourg.

Merci à @Guillaume_Vague, du groupe de scouting @touchedeballe, d’avoir répondu de façon aussi exhaustive à nos questions.

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