CULTURE SANG & OR

Interview de Simon Parzybut, président d’Handifan Club RC Lens

Le RC Lens est connu, et reconnu, en grande partie grâce à ses supporters, tous unis derrière un même blason, et pourtant d’horizons très différents. Parmi eux, de nombreux supporters en situation de handicap. Certains d’entre eux se sont organisés en formant une association. Simon Parzybut, président d’Handifan Club RC Lens, nous présente son association et ses missions.

Simon Parzybut, président d’Handifan Club RC Lens.
Photo LLDLM

Culture Sang & Or : Bonjour Simon, peux-tu te présenter à nos lecteurs ?

Simon Parzybut : Tout d’abord, un grand merci pour ton contact et ta volonté d’en savoir plus sur notre association ! Je suis Simon Parzybut, j’ai 36 ans et je suis professeur de chant et chef de chœur, mais surtout supporter du RC Lens depuis ma plus tendre enfance. En fauteuil roulant (tétraplégique) depuis onze ans suite à un mauvais plongeon en piscine et une longue rééducation à Berck-sur-Mer, j’ai repris le cours de ma vie avec, forcément, un bon nombre d’aménagements. J’habite Reims et suis abonné à Lens, je fais donc tous les déplacements pour venir assister aux matchs à domicile mais aussi à l’extérieur dans la mesure du possible. Je suis à l’origine de la création de l’association Handifan Club RC Lens dont je suis le président.

CSO : Tu as créé donc l’association Handifan Club RC Lens en 2016. D’où t’es venue l’idée ?

SP : J’ai créé l’association en 2016 après une expérience en tant qu’observateur pour l’UEFA durant l’Euro de football à Lens. J’avais été frappé à l’époque par la différence entre l’organisation des matchs durant la compétition et notre retour à Bollaert ensuite pour les matchs du Racing, en Ligue 2 à l’époque.

Évidemment, les moyens n’étaient pas les mêmes, mais nous étions vraiment en galère sur beaucoup d’aspects, et de simples aménagements me semblaient importants à mettre en place. Mais la question était : comment se faire entendre ? À l’époque, j’ai été aidé par la Fédération Française des Supporters de Football Handicapés (FFSFH), et notamment les membres de l’Handifan Club OM, pour me lancer dans cette aventure.

Dans un premier temps, nous avons dû faire face au silence du club et à quelques réticences de personnes en situation de handicap qui ne comprenaient pas l’intérêt de notre existence. Au rachat du club par Joseph Oughourlian, les choses ont changé. Nous avons enfin pu être écoutés et mettre des choses en place progressivement. C’est depuis la remontée du club en Ligue 1 il y a trois ans que les projets sont devenus beaucoup plus concrets. Le club a même embauché un jeune en alternance ces dernières semaines dont la mission est de nous aider, ce qui montre leur volonté de faire bouger les choses.

L’objectif est simple : aider toute personne en situation de handicap à vivre pleinement sa passion du RC Lens, et contribuer à l’amélioration des conditions d’accès et d’accueil au stade et en dehors.

Aujourd’hui, nous sommes une centaine d’inscrits, mais évidemment beaucoup moins à être vraiment actifs. L’objectif est aussi de se structurer pour mieux se développer.

« Montrer que venir voir un match n’est pas un parcours du combattant. »

CSO : Vous êtes donc en lien étroit avec le club. Quelles ont été les dernières avancées ?

SP : Nous avons en effet des relations privilégiées avec le club, qui a vu en nous le relai naturel pour toutes les problématiques liées aux personnes en situation de handicap. En effet, pour ceux qui ne sont pas concerné directement par le handicap, il est forcément compliqué d’en comprendre les subtilités et les réels besoins.

Les plateformes accueillant les supporters en fauteuil roulant.
Photo Handifan Club RC Lens

Au niveau des avancées récentes, on pourra citer par exemple la création d’un parking spécialement dédié à notre accueil au plus près des différentes tribunes qui sont desservies par une rampe d’accès spécifique les soirs de matchs, ou encore une barrière de sécurité qui a été installée sur les plateformes accueillant les personnes en fauteuil roulant. Mais il y a aussi des avancées au niveau billetterie, avec désormais la possibilité de réserver nos places en ligne sans passer de coup de téléphone comme c’était le cas auparavant. Tout est fait pour simplifier le parcours du supporter en situation de handicap et montrer que venir voir un match n’est pas un parcours du combattant.

CSO : Quelles améliorations restent à réaliser ?

SP : Nous avons beaucoup d’axes d’améliorations possibles, avec encore des ajustements au niveau billetterie notamment. Nous voudrions par exemple réaliser une vidéo avec le club qui serait mise en ligne pour montrer le parcours type pas à pas d’un supporter handicapé depuis le parking jusqu’à sa place dans le stade. Pour quelqu’un qui vient pour la première fois, la foule peut empêcher de bien voir les accès aux diverses tribunes, on doit donc travailler sur la signalétique en dehors et à l’intérieur du stade.

Avec le retour du club en coupe d’Europe cette année, nous devons aussi prendre en compte un nouveau facteur, à savoir l’accueil des supporters adverses en situation de handicap. L’espace visiteurs n’étant pas accessible, nous travaillons avec le club pour proposer des idées d’aménagement, car notre stade a tout de même quatre-vingt-dix ans, et la rénovation de 2016 n’a pas apporté toutes les solutions possibles.

Quelques membres de l’association Handifan Club RC Lens.
Photo Handifan Club RC Lens

On souhaite aussi créer une équipe de bénévoles pour aider les gens qui viennent pour la première fois à profiter au mieux de leur match, mais aussi veiller à la sécurité et au bon déroulement des choses pendant les matchs car nous sommes malheureusement assez fréquemment victimes d’incivilités de la part d’autres supporters. Les sujets ne manquent pas, et je pense que nous avons du boulot pour un bon nombre d’années encore.

« Faire de Lens un club pilote au niveau national dans l’accueil des supporters en situation de handicap .»

CSO : Vous organisez aussi des déplacements à l’extérieur. Les parcages permettent-ils généralement d’accueillir des personnes en situation de handicap, et plus précisément des personnes en fauteuil ? À quelles difficultés êtes-vous confrontés lors des déplacements ?

SP : C’est assez nouveau pour nous car évidemment, en Ligue 2, l’idée d’aller voir un match à l’extérieur était nettement moins intéressante. Et surtout, les conditions d’accès et d’accueil dans nos stades de Ligue 2 rendaient les choses presque impossibles.

Cette année, nous découvrons donc les joies de la coupe d’Europe et on se rend compte de la façon dont les PMR* et PSH* sont accueillis ailleurs en Europe. Des parcages pas forcément accessibles comme à Eindhoven où nous étions en pleine tribune adverse, ou au contraire quatre-vingt-dix emplacements fauteuils en plein parcage à Arsenal. C’est très instructif et on se rend compte que des problèmes, il y en a malheureusement partout ! Mais pouvoir se dire qu’on va voir notre club dans tous les stades comme tout le monde, c’est juste génial !

D’autre part, même si c’est notre souhait à l’avenir, nous ne proposons pour le moment pas une organisation complète des déplacements avec transport et hébergement, comme c’est le cas dans beaucoup de sections. Les déplacements à l’extérieur se font donc via des initiatives individuelles. Nous sommes simplement le relais en ce qui concerne les billets. C’est forcément important de pouvoir à l’avenir aider les supporters en situation de handicap à se déplacer partout et sans contraintes, et c’est un volet sur lequel nous allons bosser.

L’association tenait son assemblée générale il y a quelques jours.
Photo LLDLM

Nous avons fait notre assemblée générale il y a quelques jours dans le salons du stade Bollaert-Delelis, et je suis persuadé que nos idées vont progressivement être mises au point pour faire de Lens un club pilote au niveau national dans l’accueil des supporters en situation de handicap.

Culture Sang & Or tient à remercier Simon pour le temps consacré à cette interview. Nous espérons que les projets mis en place par Handifan Club RC Lens aboutissent.

*PSH : Personnes en situation de handicap
*PMR : Personnes à mobilité réduite

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