CULTURE SANG & OR

Histoire

Lewandowski, prénom Michel ou Mieczyslaus

Lewandowski, nom familier pour les amateurs de football, celui du buteur du FC Barcelone, Robert, qui aurait même pu rejoindre le Racing Club de Lens en 2007. Mais deux autres Lewandowski ont contribué à l’histoire du club artésien. Michel, de 1938 à 1945, et Jean, de 1949 à 1953, ont tous deux laissé leur empreinte à Lens. Plongeons-nous dans l’histoire du premier, un demi-centre rugueux. Michel Lewandowski voit le jour en Allemagne le 28 mai 1914 à Waltrop, dans le royaume de Prusse, aujourd’hui dans le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Fils de Nicolas Lewandowski, mineur, et de Victoria Polacka, il grandit au sein d’une famille ouvrière immigrée. À l’âge de sept ans, il s’installe en France avec ses parents et son frère aîné, Boleslas. Très jeune, Michel se passionne pour le football. Il débute à 14 ans dans le club de Pogon-Marles, une association polonaise de Marles-les-Mines. Après avoir essayé différents postes, il trouve sa place dans le rôle crucial de demi-centre, c’est-à-dire comme milieu de terrain axial. Il est repéré très rapidement par des clubs plus huppés, et rejoint le Stade béthunois dès 1935. Durant cette période, il vit avec son frère au 50 rue Sadi-Carnot à Béthune, et travaille comme magasinier pour Gaston Deloraine, le président du club. Une ascension fulgurante C’est au Stade béthunois que Michel Lewandowski va véritablement s’affirmer pendant plusieurs saisons, jusqu’à graver son nom dans l’histoire du club un beau jour de 1938, lors de la finale du championnat de France amateur. L’adversaire, le club de Scionzier (Haute-Savoie), finaliste malheureux de l’édition précédente, est déterminé à prendre sa revanche. Le match débute dans un relatif anonymat, avec des gradins quasi vides, mais peu à peu, le stade de Colombes se remplit, atteignant 40.000 spectateurs, attirés par le choc international France-Angleterre prévu juste après. Béthune mène d’un but à la mi-temps et enfonce le clou en début de seconde période, à 2-0. Mais Scionzier réduit l’écart à dix minutes du terme, à 2-1. Ces dernières minutes semblent interminables, sauf que Béthune peut compter sur Lewandowski et Mackowiak, deux colosses au physique de boxeur, pour verrouiller la défense. Finalement, Béthune conserve son avantage et décroche le titre de champion de France amateur. Le monde professionnel En 1938 toujours, la carrière de Michel Lewandowski prend un tournant décisif. Grâce à sa capacité à imposer sa domination physique et à se faire respecter sur le terrain, le RC Lens lui propose un contrat professionnel. Le club vient de réussir à se maintenir en première division et cherche désormais à renforcer son effectif pour viser plus haut que le simple maintien. Plusieurs départs sont enregistrés, comme ceux de Grauby et Daumin (US Boulogne), Laczny et Staho (RC Roubaix), Strohs (RC Calais), tandis que Camille Salas prend sa retraite sportive. Côté arrivées, le club accueille des recrues de choix, notamment le défenseur Jean Mathieu en provenance du FC Nancy, l’ailier gauche Marcel Ourdouillié de Dunkerque pour 70.000 francs, le gardien Armenak Erevanian de l’Olympique de Marseille, ainsi que la grande surprise du mercato, Georges Beaucourt, arrière international et capitaine de l’Olympique lillois, pour un montant record de 150.000 francs. C’est dans ce contexte que Michel Lewandowski rejoint les Sang et Or, accompagné de son coéquipier Louis Dugauguez. Malgré un changement d’entraîneur en début de saison, Lens réalise une excellente campagne, terminant à une prometteuse 7e place. Tout juste naturalisé Français, Michel Lewandowski aborde sa deuxième saison avec une équipe quasi inchangée. Cependant, à l’ouverture du championnat 1939-1940, un événement bouleverse tout : l’invasion de la Pologne par l’Allemagne marque le début de la Seconde Guerre mondiale. Presque tous les joueurs lensois sont mobilisés pour rejoindre l’armée. Il n’est plus question de football. Le football pendant la guerre La défaite militaire du printemps 1940 et l’occupation nazie plongent la France dans une situation sportive inédite, avec trois championnats distincts : ceux de la zone interdite, de la zone occupée et de la zone libre. Quelques anciens joueurs réintègrent le RC Lens, dont parmi eux Michel Lewandowski. Toutefois, dans le contexte troublé de la guerre, la victoire dans le championnat de la zone interdite des Lensois en 1941 reste anecdotique. Le 25 janvier 1940, Michel Lewandowski a épousé Lucia Anna Schwuntkowski à Waziers, et le couple s’est installé à Lens, au 41 chemin de Loos. Son acte de mariage révèle qu’il exerce la profession de peintre et que ses parents, Nicolas et Victoria, sont retournés en Pologne, à Krotoszyn, une ville située à 88 km au sud-est de Poznań. Lors de la saison 1941-1942, pas de changements notables. Mais pour la suivante, la circulation entre les zones interdite et occupée est désormais possible, et le championnat professionnel est rétabli. Cependant, lors de la saison 1943-1944, le ministre des Sports de Vichy, Joseph Pascot, décide de suspendre à nouveau ce championnat pro. Les équipes sont alors réorganisées par régions, et Michel Lewandowski intègre la nouvelle formation baptisée Lens-Artois, composée presque exclusivement de joueurs lensois. Elle remporte le titre de champion de France, bien que la compétition n’ait pu être menée à son terme. Cette même année, Lewandowski se fait remarquer lors de la demi-finale de la Coupe de France entre l’équipe de l’Artois et celle de la Champagne, jouée le 2 avril 1944 au stade Henri-Jooris de Lille. À la dernière minute, on apprend que Michel Lewandowski ne pourra pas participer à la rencontre, une absence qui suscite des interrogations. Officiellement, Lewandowski déclare une blessure contractée six semaines plus tôt lors du match Artois-Provence. Bien qu’il ait continué à jouer en se soignant, il se blesse à nouveau à l’entraînement juste avant la demi-finale. N’étant pas à 100 %, il déclare : Le match est trop important pour que je prenne le risque de devoir quitter le terrain après quelques minutes. Cependant, une autre version circule : après sa blessure, Michel Lewandowski fut indisponible pendant 15 jours et ne reçut que la moitié de son salaire, conformément au règlement professionnel. Insatisfait, il aurait réclamé l’intégralité de sa rémunération, mais face au refus du club, il aurait menacé de

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Gabriel Grauby, le talent Tunisien

De ses débuts en Tunisie à son arrivée sur la Côte d’Opale, le parcours de Gabriel Grauby est celui d’un athlète dont le talent a franchi les frontières. Cependant, à l’aube de la Seconde Guerre mondiale, sa carrière et sa vie prennent un tournant inattendu. Entre ses réussites sur le terrain et les épreuves personnelles, plongez dans le récit fascinant de ce sportif hors du commun. Premiers Pas à Paris Gabriel Louis Grauby, né le 14 juin 1911 à Tunis (Tunisie), est le fils de Germain Antonin Grauby et de Rosine Marie Pédri, tous deux domiciliés à Tunis. En Tunisie, on le retrouve dans les effectifs du club d’Hammam-Lif, situé dans la ville côtière de la banlieue sud de Tunis. Il est également convoqué à plusieurs reprises avec l’équipe amateur de Tunisie, où il aura l’opportunité d’affronter l’équipe de France B. Son aventure en France débute à Paris, au Club Français, qui évolue alors en deuxième division. Il y retrouve deux compatriotes tunisiens, Edmond Zerbib et Maurice Lévy, ainsi qu’un certain Anton Marek. Malheureusement pour Gabriel, cette expérience parisienne sera de très courte durée, le club étant contraint de se retirer de la compétition dès décembre 1934 en raison de difficultés financières. La Commission du Statut du joueur professionnel autorise alors les joueurs professionnels à signer ailleurs. Parmi eux figurent René Godard (gardien), Anton Marek et Raoul De Veigy (arrières), Marcel Daumin et Edmond Zerbib (demis), Georges Ouvray, Maurice Lévy, Josef Hanke et Walter Presch (avants). Mais quel avenir pour les joueurs amateurs tels que Devicq, Gabriel Grauby, Georges Haas ou encore Costa ? C’est le Nord C’est finalement l’Olympique Lillois qui vient faire son marché dans ce qu’il reste du Club Français en rapatriant Gabriel Grauby, Walter Presch et Devicq. Gabriel signe donc son premier contrat professionnel dans le Nord de la France, marquant ainsi le début de sa carrière au plus haut niveau du football français. Après une saison 1935-36 couronnée par une place de vice-champion de France, Gabriel Grauby se marie le 15 juin 1936 à Lille avec Fernande Zulma Debeuf — tous deux domiciliés au 78 rue Turgot. Il rejoint ensuite le RC Lens qui évolue alors en deuxième division, et laisse derrière lui un excellent souvenir, tant pour ses performances que pour son engagement. De Sang et d’or Au RC Lens, il retrouve ses anciens coéquipiers du Club Français, Anton Marek et Marcel Daumin (en provenance du Red Star). Gabriel rejoint une équipe qui a peu changé et connu d’excellents résultats au cours des deux saisons précédentes. Malgré une saison compliquée, les Lensois parviennent à réaliser une superbe phase retour, permettant au club d’accéder à la Division nationale pour la première fois de son histoire. La saison suivante, l’effectif est profondément modifié afin de permettre aux Lensois de constituer une équipe capable de rivaliser avec ce qui se fait de mieux en France. L’objectif est atteint, mais Gabriel n’aura malheureusement que peu de temps de jeu. C’est donc tout naturellement qu’il cherche un nouveau challenge pour la saison 1938-39. Avis de tempête Après les Flandres et le bassin minier, Gabriel Grauby se dirige vers la Côte d’Opale en rejoignant l’Union Sportive Boulonnaise, qui évolue en deuxième division. Il n’est pas seul dans cette nouvelle aventure, puisque son camarade de toujours Marcel Daumin le suit une fois encore. La saison est plutôt moyenne sur le plan sportif, les Boulonnais terminant à une timide 10e place. En juin 1939, comme beaucoup d’autres clubs, Boulogne se trouve dans une situation financière délicate. Malgré les diverses aides de la ville, le déficit atteint 200 000 francs. Il devient donc nécessaire de vendre les meilleurs joueurs dont font partie Harold Newell, meilleur buteur de deuxième division, le demi-centre nord-africain Abdelkader Amar, le demi-aile Gabriel Grauby, l’ailier gauche Georges Merveille et le gardien Guido Pretto. Gabriel, qui souhaite quitter la région maritime au plus vite, n’a reçu aucune lettre recommandée du club l’informant du renouvellement de son contrat pour la saison suivante, comme l’exige le règlement. Par conséquent, il est en droit de se considérer comme étant sur la liste des transferts libres et a l’intention de négocier directement avec les clubs intéressés : le Red Star, Saint-Étienne et Colmar. La Commission du Statut du Joueur Professionnel a décidé de prélever sur le cautionnement de l’US Boulonnaise la somme de 1 750 francs, réclamée par le joueur et à lui verser pour solde de tout compte au 31 août 1939. Le 1er septembre 1939, la guerre est déclarée, marquant le début d’une période de troubles. À partir de ce jour, nous perdons la trace de Gabriel Grauby. A-t-il été naturalisé ? A-t-il été enrôlé par l’armée Française ? Les réponses à ces questions restent obscures. Tout ce que nous avons à disposition est un avis de décès publié par sa femme dans le journal Le Grand Écho du Nord le 11 avril 1942, annonçant qu’il serait mort pour la France, chez lui à Tunis, le 28 mars 1942. Cette fin tragique clôt le chapitre d’un homme dont la carrière sportive a marqué une région avant de se perdre dans l’obscurité du temps. Sources :

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Albert Guéant, l’histoire d’une nuit éternelle

Dans l’histoire du football lensois, certains noms résonnent avec une profondeur particulière. Albert Guéant en est un parfait exemple. Il se distingue par un parcours exceptionnel qui mêle drame personnel et engagement sportif. Son engagement indéfectible et son rôle déterminant dans la création du Supporters’ Club Lensois font de lui une figure emblématique du club. Découvrons ensemble l’histoire poignante de cet homme dont la passion pour le football a transcendé les épreuves. Albert Beloni Alfred Guéant est né le 10 juin 1895 à Chantilly. Il est le fils de Camille Guéant, garde-frein au chemin de fer, et de Célina Couviaux. Albert est l’avant-dernier d’une fratrie de quatre enfants : deux sœurs, Maria et Camille, ainsi qu’un frère, Marcel. Malheureusement, sa mère décède soudainement à l’âge de 38 ans, alors qu’Albert n’a que 6 ans. Après ce drame, son père, Camille, se remarie le 30 octobre 1901 avec Aurélie Tabary à Guémappe, dans le Pas-de-Calais. Ensemble, ils font l’acquisition d’un hôtel-restaurant à Lens, situé rue Thiers (aujourd’hui rue Jean Letienne). Cet établissement s’appelait auparavant le café-restaurant du Chemin de Fer du Nord. Après seulement quatre ans d’existence, le RC Lens, qui dispose de moyens limités, perd de nombreux joueurs partis rejoindre des clubs voisins tels qu’Arras, Béthune ou encore Douai. À cela, s’ajoutent les départs de ceux contraints d’effectuer leurs trois années de service militaire, laissant le club en pénurie de joueurs. Face à cette situation d’urgence, Raymond Couvreur prend les choses en main et devient le premier recruteur du RC Lens. Un soir, il se rend sur la Place Verte, lieu emblématique où tout avait commencé quelques années plus tôt, pour y rencontrer de jeunes footballeurs en herbe. C’est ainsi qu’il parvient à convaincre Séverin Leleu, Léon Hébert, les frères Coviaux et un certain Albert Guéant de rejoindre les rangs du club. Albert Guéant, alors employé à la mairie de Lens, participe à la campagne contre l’Allemagne à partir de septembre 1916. Après avoir servi dans le 73e régiment d’infanterie et le 20e escadron du train, il est rapidement réformé en raison de « troubles diffus de la cornée » et d’une « scléro-choroïdite postérieure ». Il perd alors l’usage de son œil gauche, puis du droit quelques années plus tard, lorsque la maladie progresse. Une nuit éternelle commence alors pour lui. Malgré sa cécité, Albert ne renonce pas au football. Il devient un fervent supporter du RC Lens. En 1928, quelques sportifs et passionnés du club, dont Philippe Vanooteghem et Maurice Carton, se réunissent au café situé en face du monument aux morts, ainsi qu’au café Lefebvre, boulevard Basly. C’est ainsi que fut désigné le premier comité provisoire du Supporters’ Club Lensois, avec Albert Guéant comme vice-président. Ce groupe ne se contente pas d’encourager l’équipe, il contribue également au financement de plusieurs équipes de jeunes, notamment dans les catégories minimes et sous-minimes. Albert Guéant ne manque plus aucun match. La légende raconte même qu’il est le premier abonné du Racing. Mais comment fait-il pour suivre les rencontres ? Bien qu’il soit privé de la vue, il suit les rencontres grâce à une acuité auditive remarquable. Je ne vous dirais pas que rien ne m’échappe des rencontres, mais croyez-moi, les bruits, les cris, les rumeurs m’en révèlent assez pour me rendre à la joie du jeu. Albert possède une montre à gousset dont les aiguilles ne sont pas protégées, ce qui lui permet de chronométrer la partie. En se basant sur la fréquence des dégagements et des longs coups de pied, il peut déterminer si le jeu privilégie les passes courtes. Oh ! Que Lens joue mal aujourd’hui ! Ça joue en l’air tout le temps… Le vice-président du club, M. Lerat, témoigne de l’engagement et du savoir-faire d’Albert Guéant : Malgré sa cécité, il suit tous les matchs et reconnaît les joueurs à leurs dégagements. De supporter à recruteur, il n’y a qu’un pas. Albert, avec un enthousiasme débordant, fait une telle promotion de Césember, l’avant-centre nordiste, qu’il parvient à influencer les dirigeants lensois. Sous la pression de ses arguments passionnés, le club finit par lui donner raison et cède à son insistance. Extraordinaire, n’est-ce pas ? Oui, mais pas autant qu’il n’y paraît. Des clubs dirigés par des aveugles, ce n’est pas si rare… Albert Guéant épouse Angélique Vanderaerde le 16 mai 1942 à Lens et décède le 23 mars 1974. Ancien capitaine de l’équipe lensoise, il est reconnu pour sa fidélité exceptionnelle au club. Son rôle crucial dans la création du Supporters’ Club Lensois, ainsi que sa capacité remarquable à suivre les matchs grâce à son sens aigu de l’écoute fait de lui une figure incontournable et attachante du football lensois. Football, qui verse l’oubli à ce malheureux et lui apporte le réconfort, tu as décidément plus de vertus encore qu’on ne t’en reconnaît. Victor Denis, reporter pour le Miroir des sports Sources :

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Jardin à l’anglaise

Le fin connaisseur du football anglais qu’est Will Still a toutes les raisons de savourer la domination des siens face à Leicester, débordé dans tous les secteurs du jeu. Si la vérité des amicaux n’est pas celle de la compétition, au moins est-on sûr que cette équipe a l’envie. Une série s’arrête, celle des guichets fermés à Bollaert. Peut-être une autre commence-t-elle, celle des victoires dans le jardin à l’anglaise que le nouveau coach sang et or a investi avec enthousiasme, Bollaert-Delelis. Tout n’est pas parfait dans cette équipe, et notamment son effectif, qui n’est pas encore fixé. Des éléments de sa colonne vertébrale pourraient encore profiter de la fin de ce mercato pour voir si l’herbe est plus verte ailleurs, comme Brice Samba, Kevin Danso ou Elye Wahi. Mais avec ou sans eux, le club avancera. Les Sang et Or ont notamment montré qu’ils étaient prêts à jouer et à marquer même sans leur avant-centre vedette. Samedi, nous avons vu un onze conquérant, n’ayant aucun envie de céder du terrain à un adversaire qui n’était pas paré pour cette intensité. Will Still, quand il évoquait jusqu’à présent ses différences avec Franck Haise, paraissait avoir identifié, par rapport à la fin de saison 2023-24, une marge de progression dans le pressing. Il semble avoir fait beaucoup travailler son groupe sur ce point, quand on voit la difficulté des Foxes à ressortir des ballons propres. La vidéo de la rencontre une semaine auparavant contre Leverkusen donnera certes des indications aux futurs adversaires des Lensois : en étant très juste techniquement, il y a moyen de faire beaucoup courir cette équipe. Encore faut-il avoir la qualité pour. Le défi ensuite était de marquer. Comme le disait Still au micro de Wéo, trouver la faille « face à un bloc bas » est bel et bien « le plus difficile ». Mais avant d’ajouter ensuite dans les travées du stade, face à la presse : « On a vu une équipe mature, dominante, qui a su gérer les temps forts qu’on a eus tout en restant très patiente […]. Pour faire sauter ce genre de verrou, il faut y aller à l’usure ». Une recrue par ligne Aussi fougueux qu’ait l’air l’entraîneur anglo-belge, il est aussi très conscient du temps qu’il faut pour non seulement construire une victoire, mais aussi bâtir un groupe. Il travaille surtout, par la force des choses, avec l’effectif dont il a hérité, en n’ayant pu pour le moment le façonner qu’à la marge. Certains joueurs sont fortement incités à se trouver un autre club, tandis que d’autres sont relancés — la vie normale d’un club qui change de coach. Et malgré l’intention affichée de dégonfler la masse salariale, Still a déjà obtenu une recrue par ligne (Koffi, Sarr, Ojediran et Nzola), dont au milieu un jeune Nigérian qui a tout de suite fait ses premiers pas. Reste un boulot considérable à Pierre Dréossi et ses collègues jusqu’à la clôture des transferts. Si l’on se fie aux tuyaux plus ou moins crédibles des spécialistes du mercato, les acheteurs ne se bousculent pas à la Gaillette pour venir faire signer des éléments dont l’avenir est bouché chez les Sang et Or. Mais les départs se feront peut-être sans publicité préalable, comme on l’a vu pour certaines arrivées. La Ligue 1 aura sans doute alors repris, avec, on veut le croire, des titulaires lensois aussi motivés que ceux qui ont balayé les champions d’Angleterre 2016.

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Sang et Or olympique

Hier soir, la France s’est une nouvelle fois retrouvée face à l’Espagne, seulement un mois après la demi-finale de l’Euro perdue par les Bleus, pour tenter d’arracher la médaille d’or olympique. Hélas en vain. Mais une autre équipe, où se trouvaient trois joueurs lensois, a déjà réussi cet exploit. C’était il y a quarante ans. Les protagonistes Nous sommes en 1984. Big Brother et la police de la pensée sont restés fictifs. La grève des mineurs a éclaté dans la Grande-Bretagne de Margaret Thatcher. Le lecteur CD existe depuis deux ans seulement, on écoute plutôt des 45 tours. Les gens se trémoussent et s’égosillent sur « Thriller », « Still Loving You » et « Wake Me Up Before You Go-Go ». La France vient de remporter l’Euro à domicile et s’apprête à participer aux JO de Los Angeles. Parmi eux, trois joueurs du Racing Club de Lens. Didier Sénac est certes le dernier Lensois en date appelé en équipe de France, mais le premier des trois à avoir rejoint l’effectif sang et or. Ce défenseur central y effectue sa formation dès 1977. Son père, Guy Sénac, a lui aussi joué à Lens dans les années 60 comme défenseur, et a été appelé deux fois en sélection. Bien inspiré, Didier se met très vite à marcher dans ses pas. C’est ainsi qu’à dix-neuf ans seulement, il foule pour la première fois la pelouse avec le maillot lensois sur ses épaules, pour le dernier match officiel de la D1 1977-78. Il restera en tout dix ans au sein de la défense artésienne, avec à ses côtés Hervé Flak ou encore Daniel Leclercq à ses débuts, et à la fin Jean-Guy Wallemme et Éric Sikora, avant un départ vers Bordeaux. En février 1981, Daniel Xuereb est encore un joueur lyonnais lorsque Michel Hidalgo l’appelle en Équipe de France, deux saisons et demie après ses débuts en pro. Mais plus pour longtemps. L’été suivant, cet attaquant de pointe rusé rejoint le Racing Club de Lens pour former une attaque qui restera dans les mémoires, avec le Polonais Roman Ogaza et un certain François Brisson, ailier qui débarque à Lens en même temps que lui. Brisson, formé au Paris Saint-Germain, est déjà un habitué du maillot des Bleus depuis six ans. Pour Didier Sénac, à l’inverse, la porte tarde à s’ouvrir. C’est finalement lors des Jeux olympiques de 1984 qu’il est lui aussi appelé à représenter son pays pour la première fois. Nous y voilà, nos trois mousquetaires sont réunis : Brisson, Sénac, Xuereb. Aux côtés de vieux briscards comme Albert Rust ou Guy Lacombe, et de jeunes talents comme José Touré ou William Ayache. L’épopée Les Bleus se sont qualifiés pour les Jeux en l’emportant face à l’Espagne et la Belgique en éliminatoires, puis l’Allemagne de l’Ouest en barrages. Mais étonnamment, malgré un groupe abordable sur le papier, les matchs de poule se révèlent être une marche autrement plus difficile à franchir. Après un match nul 2-2 face au Qatar et une courte victoire 2-1 contre la Norvège, où Brisson inscrit un doublé, c’est Daniel Xuereb qui leur évite l’élimination en égalisant juste après l’heure de jeu face au Chili (1-1). « La préparation n’a pas été très longue, donc on s’est bonifiés au fil des matchs », reconnaîtra plus tard l’ancien Lensois au micro de France TV Sport. Il faut dire que les conditions étaient loin de ressembler à celles que l’on connaît aujourd’hui : « On dormait à cinq ou six par appartement, on avait mis des matelas par terre. C’était à la bonne franquette. » Pas de quoi entamer pour autant la confiance du buteur, qui se montre décisif à chaque confrontation ensuite. Contre l’Égypte en quarts, il marque à deux reprises et permet à son équipe de retrouver la redoutable Yougoslavie en demi-finale. Redoutable, parce que ses joueurs sont devenus les favoris de la compétition après avoir infligé une raclée 5-2 à la RFA — que les Bleus avaient certes déjà battue en barrage, mais qui avait été repêchée en raison du boycott des équipes du bloc soviétique. Comme avec l’Espagne en 2024, la France — de Michel Platini cette fois — avait aussi croisé la route de la Yougoslavie peu de temps auparavant, lors de l’Euro 84. Mais vous connaissez l’histoire : la victoire était allée aux Bleus. L’heure n’est donc pas à la revanche cette année-là. Il y a un titre olympique à aller chercher. Or, ce n’est que la troisième fois dans leur histoire que les Bleus accèdent à une demi-finale olympique, et les deux premières commencent à sérieusement dater : 1908 et 1920. Pour le plus grand plaisir des spectateurs, l’affiche tient toutes ses promesses, et même plus encore. L’entame de match des hommes d’Henri Michel est réussie : ils mènent déjà de deux buts à zéro au bout d’un quart d’heure de jeu. Mais les Yougoslaves ne l’entendent pas de cette oreille. Le scénario s’emballe, tout comme le bras de l’arbitre qui se transforme en distributeur de cartons. Juste avant la mi-temps, le solide Didier Sénac est emmené à l’hôpital après un choc tête contre tête avec Borislav Cvetković, qui lui fracture la mâchoire. La tension ne redescend pas en seconde période. Le Yougoslave Jovica Nikolić écope d’un carton rouge après avoir envoyé valser son poing sur le visage de Jean-Philippe Rohr. Être en infériorité numérique ne les empêchera pourtant pas d’envoyer le cuir au fond des filets à la 63e minute. Ni d’égaliser dix minutes plus tard. Le score est de 2-2, retour à la case départ. Dans une ambiance tendue, Cvetković finit par se faire exclure à son tour. Mais cela ne suffit toujours pas aux Bleus pour retrouver leur efficacité du début de partie. L’arbitre siffle la fin du temps réglementaire. Si en prolongation les Yougoslaves tentent de jouer la montre pour arriver aux tirs au but, les Français, eux, sont bien décidés à l’emporter le plus rapidement possible. C’est Guy Lacombe, du TFC, qui trouve enfin la faille grâce à un ballon mal dégagé. 3-2. Le combat est âpre, mais les Bleus tiennent bon. Et quelques instants

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La famille Douterlungne

Pour connaître l’identité d’un club, il faut d’abord appréhender son histoire. Pour le RC Lens, il faut remonter à la toute fin du XIXe siècle. Douterlungne, un nom de famille sans doute peu connu du grand public, occupe pourtant une place capitale dans l’histoire du club. Cette famille de pionniers a joué un rôle essentiel dans la fondation et le développement de ce qui allait devenir notre Racing. À travers cette famille, c’est tout un pan de l’histoire sportive lensoise qui se dévoile. À une époque où le football est encore inconnu du grand public, quelques jeunes étudiants commencent à s’y intéresser. Rapidement, un championnat universitaire voit le jour, regroupant différents établissements scolaires. C’est ainsi que des clubs représentant leurs villes commencent à apparaître. Du côté de Lens, des jeunes prennent l’habitude de se réunir les week-ends et pendant les vacances scolaires sur la place Verte, aujourd’hui place de la République, pour jouer au football. Après leurs matchs, tous ces jeunes se retrouvent au café Douterlungne, situé boulevard des Écoles. C’est dans ce café que tout va se jouer : le propriétaire Henri Douterlungne et son ami, Jules Van den Weghe, tous deux ressortissants belges, vont avoir l’idée de créer le premier club lensois. Henri Joseph Douterlungne, originaire de Mouscron, et sa femme, Pauline Sophie Joseph Hollemaert, font partie des nombreux Belges venus s’installer dans le Nord de la France à la fin du XIXe. Menuisier de profession, Henri s’établit dans la région lilloise, entre Tourcoing, Wattrelos, Lille et Mouvaux. Le couple n’est pas épargné par le fléau de la mortalité infantile : seuls cinq de leurs onze enfants atteignent l’âge adulte. Le plus jeune, Carlos, est né le 22 mai 1888 à Mouvaux. La famille Douterlungne déménage ensuite à Lens, où elle devient propriétaire d’un café qui deviendra bientôt le premier siège social du Racing Club Lensois. En 1903, Henri Douterlungne et Jules Van den Weghe, qui ont créé le Club Cyclo-Pédestre Lensois trois ans plus tôt, décident d’y adjoindre une section football afin de regrouper tous ces jeunes joueurs de la place Verte. En 1906, la section devient indépendante, donnant ainsi naissance au Racing Club Lensois. Jules Van den Weghe devient président et Henri Douterlungne président-adjoint, tandis que Carlos occupe le poste de trésorier. Carlos fait également partie de la toute première équipe, dans le rôle du gardien de but. Le club, désormais installé sur la pâture Mercier, adopte les couleurs vert et noir, en référence à la place Verte et au charbon. Les statuts du club, rédigés par Justin Guilbert, le fils du juge de paix de Lens, sont déposés en sous-préfecture de Béthune le 18 octobre 1907, date officielle de la création du club. L’équipe peut ainsi disputer le championnat de promotion du district de l’Artois. Le soldat Douterlungne En 1909, Carlos s’engage dans l’armée et se forme au métier d’ajusteur. Quatre mois après son retour à Lens en 1912, et après trois années de service, il est confronté au décès de son père, Henri. Le 5 avril 1913 à Lens, Carlos épouse Marie Dilly, également fille de menuisier. Leur fils Victor Henri naît le 18 juillet de la même année à Billy-Montigny. Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Carlos est mobilisé dès les premiers jours et intègre son régiment d’artillerie. Blessé à plusieurs reprises, il souffre de problèmes respiratoires dus aux gaz, d’une fracture du tibia et d’une épaule brisée. Décoré de la croix de guerre étoile de bronze, il ne peut plus rejouer au football. Libéré en 1919, il rejoint sa femme et son fils, rapatriés à Paris en 1917. Le 24 janvier 1920, leur fille Raymonde Marcelle Désirée naît à Paris, au 11 rue de Tanger, dans le 19e arrondissement. Après un retour dans la région, Carlos et Marie se séparent en 1928. À partir de cette date, la vie de Carlos devient très instable. Il finit par s’installer définitivement à Paris en 1936, rue de l’Hôtel-Colbert dans le quartier de la Sorbonne, avec sa nouvelle compagne Adolphine Canone. Il décède le 9 février 1961 à Paris et est inhumé au cimetière de Thiais, dans le Val-de-Marne. La famille Douterlungne a posé les bases d’un club qui, des décennies plus tard, fait vibrer des dizaines de milliers de supporters. Son héritage, profondément enraciné dans l’histoire du RC Lens, rappelle l’importance de se souvenir de ceux qui ont façonné notre présent. Sources :

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Les femmes et le football [2/3]

Après avoir raconté comme le ballon rond a attiré des joueuses en Grande-Bretagne à partir de la fin du XIXe siècle, Culture Sang et Or se penche sur le développement du football féminin en France, jusqu’en 1945. Les débuts Le football féminin est né, comme son homologue masculin, en Angleterre. De l’autre côté de la Manche, il faut attendre les années 1910 pour qu’il fasse son apparition, d’abord en région parisienne. Un club omnisport de la capitale, le Fémina Sport, va ouvrir la voie en ajoutant le football à la liste des disciplines pratiquées en son sein. C’est le stade Élisabeth, dans le sud de Paris, qui en devient le siège. Le premier match de football féminin en France a lieu le 30 septembre 1917, opposant deux équipes de ce club. Son score de 2-0 est inscrit dans une brève du quotidien sportif L’Auto. Alice Milliat, sportive de haut niveau et présidente du Fémina Sport à partir de 1915, devient l’une des pionnières du développement du sport féminin, au moment où les hommes sont sur le front. « La France est un pays de préjugés où persiste le désir de tenir toujours les femmes en tutelle », déclare-t-elle à l’époque. En 1919, elle prend la tête de la Fédération des sociétés féminines sportives de France (FSFSF), renommée par la suite en Fédération féminine sportive de France (FFSF). Au sortir de la Première Guerre mondiale, les équipes féminines se multiplient. Un championnat parisien créé en 1919 s’étend deux ans ans plus tard à toute la France, avec dix-huit clubs engagés. L’année 1920 voit se dérouler les premières rencontres internationales féminines. Les Bleues se lancent dans une tournée caritative en Angleterre, à Preston, Stockport, Manchester et Londres. Ce sont ensuite les Anglaises qui effectueront le déplacement en France. Envolée avortée Mais d’après Laurence Prudhomme-Poncet, historienne, « cette période des années 1920 est suivie d’une période de régression. […] C’est à partir des premières rencontres franco-anglaises que les résistances vont se faire sentir et les critiques se développer. » Les propos tenus par le cycliste Henri Desgranges en 1925 illustrent bien le genre de commentaires que l’on pouvait entendre à l’époque : « Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public : oui, d’accord. Mais qu’elles se donnent en spectacle à certains jours de fête où sera convié le public, qu’elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n’est pas entourée de murs épais, voilà qui est inacceptable. » À ce moment-là, rappelons-nous que les joueuses anglaises ont déjà été bannies des stades par la Football Association depuis quatre ans. La tendance, pour les joueuses, n’est donc pas à l’optimisme. Le contexte politique des années 1930 n’aide pas la cause des femmes, et c’est bien là un euphémisme. Alors que le football masculin progresse en se professionnalisant – déjà –, les subventions accordées à la FFSF diminuent, puis disparaissent. Deux salles, deux ambiances. La FFSF se voit contrainte de cesser de soutenir le football féminin en 1933. Le championnat féminin disparaît en 1937, après avoir vu le nombre de ses clubs diminuer drastiquement. C’est le régime de Vichy qui portera le coup fatal le 27 mars 1941 en interdisant aux femmes la pratique de plusieurs sports, dont le football. Selon ces messieurs, l’activité sportive détournerait les femmes de leur vie familiale, en particulier du rôle de mère qui leur est intimé, qu’elles aient déjà enfanté ou non. Pire, elle encouragerait le lesbianisme. À compter de ce jour, les femmes n’ont plus le droit d’accéder aux terrains des clubs affiliés aux instances officielles. Les tentatives de justifications médicales et morales fleurissent. Les critiques les plus viles pleuvent contre celles qui s’obstinent à vouloir pratiquer leur discipline. Car certaines sportives en France et dans d’autres pays d’Europe font de la résistance, y compris en organisant des matchs clandestins, alors que tout est fait pour décrédibiliser et anéantir le football féminin. Les efforts de ces rebelles, bien que vitaux, restent un souffle tout juste suffisant pour ne pas voir s’éteindre les dernières braises de ce qui était encore, au lendemain de la Grande Guerre, un feu de joie. Dans un tel contexte, comment espérer un renouveau ? C’est ce que nous verrons dans la dernière partie, avec, bien sûr, un focus sur les féminines du RC Lens. À suivre… [La partie 1/3 de cette série est à lire ici]

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René Gouillard, Un Regard sur l’Histoire

René Gouillard, reconnaissable entre tous grâce à ses fameuses lunettes, a marqué l’histoire du RC Lens par sa fidélité et sa polyvalence. Propulsé dans le monde professionnel par un heureux hasard, il a su saisir sa chance lorsque la plupart des joueurs lensois sont partis à la guerre. Remplaçant admirablement l’expérimenté Raymond François, il s’est distingué comme un joueur exemplaire et un homme dévoué à son équipe. Né le 22 octobre 1921 à Avion, dans la cité du Mont Gré, René Marcel Jules Eugène Gouillard grandit dans une famille modeste. Son père, Marcel Émile Énée Henri Gouillard, travaille au chemin de fer, tandis que sa mère, Léontine Marie Richard, est couturière. Très rapidement, la petite famille déménage à Lille. C’est là que René commence sa carrière footballistique, au club de l’Iris Club Lambersart, où il joue jusqu’à seize ans en tant que centre-avant. Les Premières Années Avec l’arrivée du professionnalisme, l’Iris Club Lambersart, disposant de moyens limités, s’oriente vers la formation. Les résultats ne se font pas attendre, et le club joue les premiers rôles dans chaque catégorie de jeunes. L’équipe des minimes devient championne du Nord et remporte la coupe du Nord. Parmi ces jeunes évoluant sous les ordres de Gaston Dubreucq, on retrouve notamment Albert Dubreucq, Jean Baratte et bien entendu René Gouillard. Ce dernier retrouvera d’ailleurs son ancien partenaire Jean Baratte quelques années plus tard lors de la finale de la coupe de France de 1948. Un concours de circonstance En 1939, le père de René Gouillard est nommé sous-chef de gare à Lens, un événement déterminant qui lance sa carrière. Durant l’intersaison 1939, les dirigeants lensois, satisfaits des derniers résultats, décident d’améliorer l’équipe sans y apporter trop de modifications. Cependant, un changement de coach est opéré : József Eisenhoffer repart pour Marseille tandis que Jack Galbraith fait son grand retour. C’est dans ce contexte que René Gouillard signe au RC Lens en tant qu’amateur. Quelques jours après sa signature, un nouvel événement, tragique celui-ci, vient accélérer sa carrière. Nous sommes en septembre 1939 et l’Allemagne vient d’envahir la Pologne. La France entre en guerre ! Arménak Erévanian, Anton Marek, Jean Mathieu, Georges Beaucourt, Michel Levandowski, Raymond François, Marcel Ourdouillé, Marian Calinski, Siklo, Paul Mouton, Stanis, Louis Dugauguez, Henri Bonnel et Albert François sont tous appelés par leurs régiments respectifs. Le club n’a alors pas d’autre choix que de faire confiance aux jeunes pour essayer de monter une équipe. Trop jeune pour partir à la guerre, René Gouillard saisit sa chance et profite des absences de nombreux joueurs appelés sous les drapeaux pour s’imposer au sein de l’équipe. La polyvalence René Gouillard fait ses débuts au RC Lens en reculant d’un cran, dans la position du demi-centre. Il finit même par devenir arrière droit/gauche, puis occuper le centre. Il ne lui reste plus qu’à jouer au poste de gardien de but. C’est chose faite en 1944, dans le championnat fédéral avec l’équipe de Lens-Artois contre la Lorraine, suite à la blessure du gardien Charles Créteur en fin de première mi-temps. Le journaliste Lucien Gamblin le décrit ainsi : « Rapide, décidé (malgré ses lunettes), René Gouillard frappe la balle, comme tous ses coéquipiers, avec puissance et sûreté. Il anticipe fort bien l’action ou le geste de l’adversaire. Il joue sobrement, directement et sans rechercher l’exploit. Ce qu’il veut, c’est que son équipe remporte la victoire, et il faut lui reconnaître qu’il s’emploie à fond pour cela. Encadré comme il l’est, sérieux, ambitieux, Gouillard doit s’élever au plan supérieur des footballeurs de notre pays, et ce demi-centre de vingt-deux ans a beaucoup de chances de s’imposer. » Lucien Gamblin Après le RC Lens Marié à Lens le 27 septembre 1941 avec Marcelle Andrea Mismacque, René Gouillard a tout connu avec le RC Lens. Vainqueur du championnat de la zone interdite, il remporte également le championnat avec l’équipe fédérale Lens-Artois. Relégué en deuxième division en 1947, il atteint malgré tout la finale de la coupe de France en 1948. Après son départ en 1950, il ne reste que Marceau Stricanne, son ancien coéquipier de l’équipe fédérale Lens-Artois, comme joueur portant des lunettes dans l’élite du football français. Il sera très vite rejoint par le Hollandais Joop Stoffelen, un ancien de l’Ajax d’Amsterdam qui débarque au RC Paris. Recruté par Amiens lors de l’intersaison 1950, alors qu’il allait avoir vingt-neuf ans, René Gouillard participe à la préparation et aux matchs d’avant-saison de l’équipe professionnelle. Le 27 août 1950, il dispute le premier match du championnat de deuxième division, perdu contre Rouen. Ce jour-là, il retrouve le poste de ses débuts, centre-avant. Ce sera son premier et dernier match avec Amiens, puisqu’il quitte aussitôt le club pour une raison inconnue et rejoint le club de l’ASSB Oignies. La carrière de René Gouillard est marquée par la fidélité et la polyvalence. De ses débuts à Lambersart jusqu’à ses années glorieuses au RC Lens, Gouillard a toujours fait preuve d’un engagement exemplaire. Il est décédé le 22 février 1972 à Liévin. Sources :

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Hédoire aux mains d’argent

Le 14 juin 1979, le RC Lens vit sa nuit la plus longue lors d’un match de barrage contre le Paris FC. C’est ce soir-là devant 33 896 supporters que Francis Hédoire, portier du RC Lens, va choisir pour rentrer dans la légende. Il permet ainsi aux Lensois d’accéder une nouvelle fois à l’élite du football français. Dix mois auparavant, le club, qui flirtait avec l’Europe, se retrouve à la 18e place du classement, synonyme de relégation. Accompagné par Troyes et Rouen, le Racing se prépare à affronter le rugueux championnat de deuxième division. Malgré son statut de favori du groupe B, aux côtés de Rennes et Rouen, la remontée s’annonce difficile en raison des départs marquants de Didier Six à Marseille, de Farès Bousdira à Nice, de Jean-Marie Élie à Saint-Étienne et de Jean-Pierre Tempet à Nantes puis à Laval. Un autre changement majeur s’opère : Arnold Sowinski, entraîneur du RC lens depuis neuf saisons, se met en retrait, cédant ainsi sa place à un autre ancien du club, Roger Lemerre. L’ancien mentor du Red Star devient le seul maître à bord. Ex-défenseur du Racing et artisan de la remontée de 1973, il dispose d’un atout précieux : il connaît bien la maison Sang et Or. Après un départ timide, les Lensois voient la surprenante équipe de Brest leur passer devant au classement. Peu à peu, ils découvrent le jeu heurté et engagé qui symbolise ce championnat. À mi-parcours, les Lensois se retrouvent à cinq points des Brestois. Mais la machine lensoise semble enrayée et ne parvient pas à combler son retard. En février 1979, après vingt-deux journées, les Brestois disposent de dix points d’avance. Roger Lemerre est menacé, il faut faire vite. Le déclic se produit grâce à la coupe de France. Et c’est le club de Laval, pensionnaire de première division – où l’on retrouve un certain Jean-Pierre Tempet –, qui va en faire les frais. Le 10 février 1979, au stade Grimonprez-Jooris, par l’intermédiaire de Joachim Marx, Yannick Bourloton et Robert Sab, Lens se qualifie pour les seizièmes de finale et espère lancer sa saison. « Je suis d’abord, et je tiens à le dire malgré les apparences, profondément heureux pour les joueurs. Je pense en plus que cette victoire va les relancer en championnat. Mais je ne sais pas si je serai là pour voir cela. » Roger Lemerre Malgré une fin de saison plutôt bonne, les Lensois ne parviennent pas à rattraper les Brestois, mais accrochent la deuxième place du groupe B. Le Racing se lance alors dans la bataille des barrages. Premier obstacle en vue, l’Olympique Avignonnais, deuxième du groupe A. Au parc des sports d’Avignon, les hommes de Roger Lemerre livrent une contre-performance totale, plaçant le RC Lens dans une position très délicate (défaite 2-0). Cependant, lors du match retour, les Sang et Or renversent la situation devant 15 000 spectateurs. Robert Llorens (1-0, 15e) et Robert Sab (2-0, 79e) permettent à Lens d’égaliser et d’arracher la prolongation. C’est alors que Joachim Marx s’offre un doublé synonyme de qualification (victoire 4-1, 113e). En première division, le Paris FC termine à une bien triste 19e place. Battu à la différence de buts par Valenciennes, le Paris FC est relégué directement à l’étage inférieur. Cependant, le FC Gueugnon, vainqueur du groupe A de la deuxième division, refuse le statut professionnel. Le club Parisien est ainsi repêché pour disputer les barrages et se voit offrir une dernière chance de sauver sa place. C’est ainsi que le RC Lens s’apprête à disputer une double confrontation face au Paris FC. À la clé, un ticket d’entrée dans l’élite du football Français. Grâce à son entre-jeu composé de Georges Eo, Jean-Noël Huck, Bernard Lech (ex-Lensois) et Bernard Guignedoux, le Paris FC pratique un football de qualité qui lui vaut le respect des puristes. Cependant, son attaque se révèle inefficace. Jean-François Beltramini, meilleur buteur Parisien, est trop souvent isolé. Une autre difficulté pour le Paris FC est la désertion de son public. Comme annoncée, la double confrontation donne lieu à deux rencontres très serrées. Au Parc des Princes, le match aller se déroule devant 4 000 spectateurs, dont 3 000 Lensois. Personne ne trouve le chemin des filets (0-0). Le même scénario se présente au match retour à Bollaert, où les 33 896 spectateurs doivent patienter jusqu’au bout de la nuit pour connaître le vainqueur. C’est le moment de la séance des tirs au but. Tout Bollaert retient son souffle. Sur la première frappe du Parisien Guignedoux, le portier lensois Francis Hédoire part du bon côté. Lorsque Beltramini s’avance à son tour, Hédoire anticipe et réitère sa performance. « J’étais sûr qu’il tenterait de m’entraîner de l’autre côté. Je ne me suis pas laissé piéger. » Francis Hédoire À ce moment-là, rien n’est encore joué, mais la pression devient trop forte pour les Parisiens. Le pauvre Humberto Rafael Bravo manque le cadre. Le RC Lens, lui, ne tremble pas. Michel Joly conclue magnifiquement cette séance des tirs au but et renvoie le Racing dans l’élite du football français. « J’ai effectué les bons choix en plongeant chaque fois du bon côté. À droite, puis sur la gauche, et j’ai remporté mes deux premiers duels. À partir de là, les choses ont commencé à se compliquer singulièrement pour nos adversaires. Le troisième penalty leur fut fatal. » Francis Hédoire Commentaires Audio de Jean Crinon (document RTF) Ce match contre le Paris FC restera gravé dans les mémoires des supporters lensois comme une nuit de gloire et de tension extrême. Grâce à la détermination des joueurs et à la performance héroïque de Francis Hédoire, le RC Lens retrouve sa place en première division, marquant le début d’une nouvelle ère sous la direction d’Arnold Sowinski qui fait son grand retour. Roger Lemerre quant à lui fait ses valises et part vers de nouvelles destinées avec le sentiment du devoir accompli. Sources :

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