Juin 1934. Le RC Lens vient d’être admis pour la première fois chez les pros. Il ne reste plus aux dirigeants qu’à faire l’impossible pour que cette expérience ne soit pas la dernière. Financièrement aidé par les mines de Lens, il faut désormais mettre sur pied une formation capable de se maintenir.
Pour le poste d’entraîneur, on pense d’abord à Kimpton puis à Jack Harris (stade Béthunois) qui sera limogé après 5 séances d’entraînement. Finalement, c’est le Belge De Veen (Olympique Lillois, Courtrai) qui sera choisi. En ce qui concerne les joueurs, après la signature des ex-amateurs, il est temps de recruter. On voit alors apparaître les premières vedettes « Sang et Or » avec les signatures de Salas (US Marocaine), Rizzo (US Marocaine) et Walter (RC Calais). En cours de saison, le 7 octobre, après un match amical contre Attila Budapest, le club signera également celui qui deviendra une des premières légendes du club, Ladislas Smid, dit Siklo.
Le gardien de but Camille Salas, fraîchement arrivé de l’US Marocaine, fera le forcing pour rapatrier son ancien coéquipier Gildo Rizzo. C’est ainsi que Salas et Rizzo furent les premiers Marocains à jouer pour le Racing Club de Lens.
« Dites bien aux supporters Lensois que je suis venu à Lens pour défendre de tout mon cœur les couleurs du Racing »
Gildo Rizzo
Gildo Rizzo est né en février 1911 à Tunis (Tunisie) de parents Italiens, Joseph Rizzo, entrepreneur de travaux publics, et Joséphine Calvaruso. Rapidement, ses parents déménagent à El Jadida au Maroc où il commence sa carrière de footballeur au Sporting Club de Mazagan. Il prend ensuite la direction de l’Olympique Marocain pendant 2 saisons où il aura l’occasion de jouer contre l’Olympique Lillois, alors Champion de France,
et à l’issue duquel les Lillois durent s’incliner 7 à 0. Il jouera ensuite à l’US Marocaine, avant de rejoindre le RC Lens.
Avec 1,66m pour 72 kg, Gildo Rizzo effectue le 100 m en douze secondes. Voilà le secret de ses accélérations fulgurantes sur son aile gauche. Durant cette saison 1934/35, il inscrira un total de 9 buts et obtiendra avec le RC Lens une très belle cinquième place de deuxième division.
Pour la saison suivante, il sera vendu à l’US Boulogne, tout comme ses anciens coéquipiers Lensois Penel, Keller, Walter (libre) et Debruykère (libre) qui le rejoindront sur la Côte d’Opale. Un transfert qui va changer sa vie puisqu’il y fera la rencontre de Louise Evrard, une Boulonnaise, qui deviendra sa femme en 1941. Après une saison à Boulogne, Gildo repart au Maroc, et plus précisément à El-Jadida au Sporting Club de Mazagan, pour retrouver sa famille. Il y sera joueur, entraîneur, mais également dirigeant avec plusieurs de ses frères. Ses frères sont ou furent tous d’excellents footballeurs. Guido, François, Octave, Hector, Dante et Hercule joueront pour le Sporting Club de Mazagan et l’US Marocaine.
Un de ses frères, Guido Rizzo, joua au stade de Reims de 1936 à 1939, mais il sera tué durant la Seconde Guerre mondiale (1er régiment de zouaves) le 11 juin 1940, à Ville-Dommange dans la Marne. Tous ont participé à la Seconde Guerre mondiale dans la campagne de France et d’Italie. Hercule Rizzo fut résistant dans les forces aériennes françaises libres et Dante Rizzo (2e canonnier du III/63e RAA) a quant à lui été cité (croix de guerre avec étoile de bronze) :
« Excellent chauffeur de voiture légère, très sérieux, a assuré de jour et de nuit pendant la période d’offensive en Italie, la liaison entre l’avant et l’arrière, toujours disponible pour les missions délicates. A fait preuve au cours des campagnes de France et d’Allemagne d’un dévouement absolu et de beaucoup de courage dans les différentes tâches qui lui ont été confiées. »
Autre fait intéressant : Hector Rizzo, bien qu’artiste du ballon rond, fut également très doué avec un crayon entre les mains. Il a notamment dessiné les affiches de la Foire Exposition de Mazagan de 1949 et 1950.
La fratrie Rizzo au complet : Germaine (1908 Tunis – 2001 Sorgues) / Gildo (1911 Tunis) / Guido (1915 El Jadida – 1940 Ville-Dommange) / Hector (1917 El-Jadida – 2006 Bardos) / Paul (1918 El Jadida – 2002 Marseille) / Dante (1921 El-Jadida – 2011 Toulouse) / Hercule (1924 El-Jadida – 2005 Arles) / Octave (1926 El Jadida – 2001 Châteauroux) / François / Pierre / Marie.
C’est dans les années 1950 que nous perdons malheureusement la trace de Gildo Rizzo. Aucune trace de lui dans la base de l’Insee (liste des décès survenus sur le sol Français depuis 1970), ou l’on retrouve pourtant la trace de quasiment tous ses frères et sœur. Est-il revenu en France, ou est-il resté au Maroc ? Nous aurons peut-être un jour la réponse.
Sources :
- Plaquette souvenir du cinquantenaire du Racing Club de Lens
- Le Grand écho du Nord – 9 octobre 1934
- Le Petit Marocain – 9 septembre 1950
- Le Petit Marocain – 13 novembre 1944
- Le Petit Marocain – 20 octobre 1941
- La Vigie Marocaine – 7 aout 1945
- Mémoire des hommes
- Insee