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Louis Brossard, l’ingénieur des mines

C’est l’histoire d’un ingénieur des mines que rien ne prédestinait à devenir un jour président du Racing Club de Lens. À l’époque du rapprochement du Racing club Lensois et des mines de Lens, Louis Brossard fut sollicité pour prendre la tête du club. Il sera l’homme du renouveau, avec la professionnalisation, la montée rapide du club en deuxième division et un nouveau stade qui portera le nom de Félix-Bollaert.

Louis Brossard
Louis Brossard
© cinquantenaire du RC Lens

Lorsqu’on me demanda d’assumer la présidence de notre club, je n’ai pas cru pouvoir me dérober à cet appel amical : j’étais sûr de trouver parmi les anciens, les compétences et les dévouements susceptibles de m’épauler dans une tâche parfois difficile.

Louis Brossard

Louis Brossard n’est pas Lensois de naissance. Né le 27 mars 1897 à La Rochelle, il est le fils d’Angel Émile Jules Brossard, pharmacien, et de Jeanne Noémie Beausoleil. Au début de la Grande Guerre, il est engagé volontaire pour servir aux armées dans une unité combattante plus de trois mois avant l’appel de la classe. Il intègre le 52e régiment d’artillerie de campagne, puis le 24e régiment. Il s’intéresse beaucoup au ballon ovale. Pendant le conflit, son régiment tarbais possédait même sa propre équipe de rugby.

Dans nos cantonnements de repos, des matches acharnés avaient lieu et le très modeste demi de mêlée que j’étais eut maintes fois l’honneur d’être plaqué aux jambes par des internationaux en renom.

Il fut cité à plusieurs reprises:

  • Le 15 juin 1917 : « Jeune officier d’un grand mérite, a toujours assuré sous les bombardements les plus violents avec beaucoup de courage et de sang-froid les missions de liaisons et d’observation dont il était chargé aux postes de première ligne ».
  • Le 9 juillet 1918 : « Officier de renseignements pendant la période des combats sous Noyon et devant Soissons. A rempli les missions qui lui ont été confiées avec la plus vive intelligence et le plus bel entrain ».

Au sortir de la guerre, il se marie avec Suzanne Régnier, à La Rochelle le 30 janvier 1922. Sa formation d’ingénieur à l’École des mines de Paris l’amène à la Compagnie des mines de Lens. Il réside au 12 rue du Pôle Nord (aujourd’hui rue Souvraz). Fraîchement installé, Louis Brossard va connaître en 1934 des événements qui marqueront sa vie : sa prise de fonction en tant que président du RC Lens, et sa promotion en tant que chevalier de la Légion d’honneur, par le décret du 13 juillet 1934. Dans son dossier, on met en avant son brillant parcours d’ingénieur, de combattant et de dirigeant sportif. Mais on peut également retrouver une petite scène de vie à La Rochelle en 1925, où il participa au sauvetage d’un baigneur au large.

Magazine Sang et Or
Magazine Sang et Or
© Archives départementales du P.D.C

À l’occasion de la sortie du premier numéro du magazine Sang et Or, le 22 août 1937, il prend la plume pour écrire ce texte qui paraît encore aujourd’hui d’actualité :

Un club ne vit pas seulement des résultats de ses équipes, il vit surtout de la bonne harmonie et de la compréhension mutuelle de tous ceux qui gravitent dans son champ d’action : joueurs, dirigeants, amis, supporters, foule sportive heureuse d’applaudir aux succès de ses favoris, mais aussi heureuse de sentir qu’elle fait partie de cette grande famille qu’est son club, qu’elle est un des éléments de son activité et que tout ce qui le touche lui est sensible à elle aussi.

Il aura la chance lors de sa présidence qui s’étala sur plus de 20 ans (durée seulement dépassée par Gervais Martel) de voir émerger les premières stars du club, les Stanis, Siklo, Ourdouillé et autres. Et il installe le club dans ce qui est encore aujourd’hui son stade, baptisé Félix-Bollaert en 1936. On le décrit comme un homme calme, réfléchi, qui n’aime pas le conflit et qui fume souvent la pipe,

Le fait que je la garde en bouche, m’oblige à me taire. Cela me permet de réfléchir tranquillement. J’aime donner un peu de temps au temps. Trancher sur un coup de tête m’insupporte. Je déteste agir dans la précipitation. Dès lors, ma pipe m’aide à ne pas y verser.

Louis Brossard
Xercès Louis et Louis Brossard
©  Vintage RC Lens

Durant la Seconde Guerre mondiale, Louis Brossard fait preuve de beaucoup de clairvoyance. Elias Mellul, joueur de confession juive, est rapatrié chez lui, au Maroc, un an avant les premières lois sur le statut des Juifs du régime de Vichy. Louis Brossard vient très certainement de lui sauver la vie ! À la fin de la guerre, Elias réintégrera l’effectif, et participera notamment à la finale de la Coupe de France 1948 contre Lille.

En 1949, les dirigeants Lensois vont observer le Nœuxois Raymond Kopaszewski, mais il est jugé trop frêle. Après ses deux belles saisons au SCO d’Angers, Louis Brossard et le coach du Racing, Ludvik Dupal, veulent corriger leur erreur et faire revenir Kopa dans le bassin minier. Mais Bordeaux, puis Reims, entrent sur le ring pour se disputer ce surdoué. Et c’est finalement Reims qui remporte le match au terme d’âpres négociations financières avec le joueur. L’occasion est passée : nous ne verrons jamais Raymond Kopa sous les couleurs d’un club professionnel de la région.

À la fin de sa présidence en 1957, Louis Brossard, père d’une famille nombreuse, repart dans sa Charente-Maritime natale, du côté de Royan au 6 avenue des Primevères. Il aura finalement connu des hauts et des bas pendant ces 23 ans de présidence, mais il part avec le sentiment du devoir accompli, puisque le club est désormais très bien installé dans le premier échelon national. Quand on lui demande quel est son meilleur souvenir, il pense immédiatement au quart de finale de la Coupe de France contre le Stade Français le 3 avril 1948. De cette victoire 2-1 contre un club de première division, il dira :

Depuis 22 ans, j’ai connu les unes et les autres, mais l’une d’entre elles reste gravée en ma mémoire comme la plus riche en belles et fortes émotions.

Il est décédé le 4 novembre 1971 à Rocquencourt dans les Yvelines.

Louis Brossard
Louis Brossard
© Archives départementales du P.D.C

Sources :

  • Archives départementales du Pas-de-Calais
  • Archives départementales de Charente Maritime
  • Plaquette souvenir du cinquantenaire du Racing Club de Lens
  • Racing club de Lens, un siècle de passion en Sang et Or – Isabelle Dupont et Dominique Paquet
  • RC Lens secrets de transfert – David Derieux et Grégory Lallemand
  • RC Lens cent ans de passion – La Voix du Nord
  • Base de données Léonore
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