Que retiendra-t-on d’un derby aussi pénible à regarder ? Très probablement rien côté lensois, tant le niveau de ce match sur le terrain du rival a suscité d’inquiétude et d’ennui.

Exagérément fébrile
Si le supporter est toujours remonté avant un derby, l’observateur gardant la tête froide attendait des Sang et Or, face à un huitième de finaliste de la Ligue des champions, peu de choses en vérité. Avec deux défenseurs sur le flanc, Juma Bah et Jonathan Gradit, et une attaque en manque de repères, Lens cédait sans conteste à son voisin le statut de favori. Et finalement, cet adversaire a été faible, surnageant face à la médiocrité générale. Il peut se féliciter, dans sa quête de place européenne, que Lens lui ait offert les trois points sur un plateau d’argent.
Nul besoin de revenir sur l’entame de match très compliquée d’un défenseur de dix-sept ans, promis à un bel avenir mais titularisé faute de mieux, et d’un gardien australien qu’on sent mal à l’aise balle au pied. Collectivement, lors d’une première période horrible, où passer la ligne médiane en possession du ballon a semblé un exploit presque hors d’atteinte, l’équipe de Will Still a été exagérément fébrile. Puis fort inoffensive lors d’une seconde période très passable. Quand rien ne va, quand une des deux équipes semble anesthésiée de la sorte face à l’enjeu et à l’exigence du plus haut niveau, ses supporters n’ont plus qu’à espérer éviter l’humiliation. Car pas besoin d’être plus âgé que Kyllian Antonio pour se souvenir de scores très larges, en faveur du LOSC, dans ce stade de Villeneuve-d’Ascq.
Or, d’avanie cette fois il n’y eut point. Après le but de Fernandez-Pardo, les Dogues devinrent terriblement inefficaces, tandis que Lens gagna peu à peu en maîtrise… mais presque sans jamais se montrer dangereux. On a glosé cette saison sur l’invendable produit qu’est la Ligue 1 pour DAZN. Imaginez une seconde le long supplice que dut être cette rencontre pour ses abonnés au cas où ils auraient le malheur de ne pas être Nordistes. Des relances précipitées de défenseurs manquant d’inspiration. Des échanges bénins entre milieux de terrain dans leur camp, pour se rassurer. Des festivals de gestes ratés à l’approche du but adverse. De longues successions de combinaisons approximatives en attaque, cueillies sans mal par les défenses. Et ainsi de suite d’un côté comme de l’autre, avec à la fin ce résultat improbable : la possession a été majoritairement lensoise, Lille abandonnant toute ambition de creuser l’écart, et sentant bien que les visiteurs… n’avaient pratiquement rien à opposer, presque aucune chance d’égaliser.
« Une bataille tactique », a commenté le RC Lens, pour éviter d’écrire combien ce fut indigent du côté des joueurs offensifs, chez les deux formations. Le néant contre le néant, sauf que les uns menaient 1-0, et les autres s’inquiétaient de voir tourner l’horloge. À aucun moment nous n’avons vibré. Au terme de cette purge, puisque c’est le terme consacré, il va falloir se remettre en question tant les Lensois, vêtus de blanc et vert, se sont montrés méconnaissables. Ils avaient toute latitude pour revenir du plus court déplacement de la saison avec un score nul et vierge, qui aurait été salué comme un bon résultat. Ils ont paru très loin de trouver la bonne formule devant. Ils se sont donc débrouillés pour perdre, contre un LOSC qui a livré l’une des performances les plus inconsistantes qui soient.
Sabordages
Nous n’en ferons pas un drame : un tel match ne dit rien du niveau des deux équipes. Pour ce qui concerne le RC Lens, ce qui est sans doute plus significatif que la piètre résistance opposée au rival régional, c’est le classement au terme de ces vingt-sept journées : neuvième, au beau milieu du tableau, avec onze victoires mais dix défaites, derrière Brest, une équipe qui a connu son lot de naufrages mais qui se défend vaillamment avec les moyens du bord, quand Lens cette saison donne l’impression d’alterner le solide — par exemple lors des deux journées qui ont précédé ce derby —, et les sabordages, avec cette vente de sa défense à la découpe à l’occasion du mercato d’hiver, suivie par des opérations portes ouvertes lors de rencontres à sa portée.
Dans l’optique, généralement admise, de la préparation de la saison 2025-26, Lille-Lens est le contraire d’un match référence. Ce sera un avertissement sans frais, à condition de repartir sur d’autres bases lors de la réception dimanche des Verts, qui viennent de vivre bien pire : prendre une valise (1-6) à domicile. Contre Saint-Étienne, groupe au complet ou pas, Bollaert attendra la victoire ou rien. Et plus d’intensité et d’adresse près des cages adverses.
